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dimanche 11 mars 2012

Lamorene en 1953


S'il y avait un élément de décor qui signifiait l'excellence du confort au foyer durant les années 50 c'était très certainement le tapis. Toutefois, comme n'importe quel surface de plancher, le tapis a besoin d'être nettoyé une fois de temps en temps. Si votre maison aurait été pourvue de tapis en 1953, l'année à laquelle parut cette publicité très intéressante, il y a fort à parier que vous auriez utilisé le produit-vedette d'aujourd'hui: le nettoyeur de tapis Lamorene.

Évidemment en regardant le produit en question il y a lieu de se poser quelques questions, surtout en apperçevant le balai... Alors qu'est-ce que c'est que ce truc et comment ça fonctionne exactement?

Vous voilà donc dans votre salon prêt à nettoyer votre grand tapis qui en a bien besoin. Évidemment vous avez prit soin de tasser les meubles. Comme c'est une corvée qui n'est pas exactement très intéressante vous avez sorti votre tourne-disque et y avez déposé le 78-tours de l'heure, That's Amore du chanteur Dean Martin.

Entre les mains vous avez une bouteille en verre de Lamorene, un produit pour nettoyer les tapis. Vous ouvrez le pot et êtes surpris de voir que le produit à l'intérieur ressemble à de la sciure de bois. En réalité il s'agit d'un composé de fibre de cellulose auquel on a ajouté un certain nombre d'ingrédients ayant des propriétés nettoyantes. Comme indiqué, vous saupoudrez le produit sur le tapis comme du fromage parmesan. Vous attendez un peu puis, avec un balai, vous vous mettez à brosser. La saleté s'étant collée au Lamorene elle peut alors être ramassée plus facilement. Et voilà le travail.

Enfin, c'est comme ça que l'on s'imagine le travail si on se fie à cette publicité. Mais est-ce le produit fonctionnait exactement comme mentionné ou bien s'agissait-il d'une poudre de perlinpinpin? C'est justement la question que se posa le Reader's Digest au début des années 50 et afin d'en avoir le coeur net, décida d'envoyer le produit à une compagnie spécialisée dans l'évaluation des produits, la York research Corporation basée à Stamford au Connecticut. Les résultats furent éclatants car la compagnie affirma qu'après avoir testé plus de 100 produits sur 1000 tapis il s'avèra que Glamorene (c'était son nom aux États-Unis) était définitivement le meilleur. C'est ce qui explique le sceau que l'on apperçoit en bas de l'annonce à droite.

Le Digest prépara incidemment une publicité de trois pages pour leur magazine qui tirait alors 15 millions d'exemplaires par mois. De Witt Walace, le propriétaire et éditeur du Digest prit toutefois la peine d'avertir la compagnie de se préparer puisqu'il serait fort probable que la demande pour Glamorene serait assez considérable.

Wallace eut-il raison? Et comment! La compagnie ne parvint pas à fournir à la demande et les ventes explosèrent alors qu'il se vendait pour pour plus d'un millions de dollars de Glamorene par mois.

Il y eut cepandant une sérieuse ombre au tableau lorsqu'un employé de la compagnie aérienne Pan American affecté au nettoyage des tapis d'avion fut trouvé mort après avoir vraisemblablement inhalé de l'hydrocarbone halogéné provenant de trichloréthylène, l'un des composants de Glamorene. enfin, c'est ce qu'indiqua le rapport du coroner. L'histoire fit boule ne neige et le département de santé publique de San Francisco eut tôt fait de bannir Glamorene.

Wallace du Digest, demanda au vice-président de la York Research, Warren C. Hyer de se rendre à San Francisco avec des toxicologistes jouissant d'une grande réputation aux États-Unis afin de fouiller le fond de cette histoire. Il s'avèra que le nettoyeur n'avait pas inhalé un composant de Glamorene mais bien du tétrachlorure de carbone, un truc qui ne se retrouvait même pas dans le Glamorene. Suite à cette découverte la compagnie qui fabriquait le Glamorene entreprit une campagne publicitaire d'un demi million de dollars et Glamorene retrouva la voie du succès commercial. Enfin, jusqu'a l'apparition des aspirateur munis de balais motorisés, les fameux power-nozzles. Quant à Lamorene il n'est plus disponible depuis plusieurs années. Moins visible, sous la photo, se trouve une mention quant au fabricant du tapis que l'on voit; il s'agit du modèle Carvercraft Broadloom de Harding Carpets Limited, une compagnie de Brantford en Ontario et qui n'existe plus aujourd'hui.

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