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samedi 14 mars 2015

portĭcus


Détail de la partie supérieure du portique de l’église du Sacré-Cœur, située sur la rue Ontario entre Plessis et Alexandre-de-Sève. Il s’agit d’une certaine quantité de photos que j’ai prises de cette église qui possède, comme bien d’autre, sa petite histoire et que je vais partager avec vous aujourd’hui.

Cette église-là a été construite en 1887 selon les plans de l’architecte Joseph Venne mais le soubassement, œuvre de l’architecte Adolphe Lévêque, existait depuis 1876. L’église se trouvait dans le faubourg Sainte-Marie, tout juste à côté du faubourg Saint-Jacques, lequel commençait deux rues à l’ouest. C’était le temps où la rue Alexandre-de-Sève portait le nom de Maisonneuve et que la rue Maisonneuve s’appelait Mignone, laquelle s’arrêtait à Saint-Urbain. La construction a fait appel à son lot d’artisans doués, lesquels ont certainement dû recevoir à plus d’une reprise la visite de monseigneur Fabre.

C’est aussi le temps où Montréal s’active, où ses industries commencent à prendre de plus en plus de vigueur. Depuis l’année précédente, de par la gare Dalhousie, les trains du Canadien Pacifique joignent maintenant la lointaine ville de Vancouver dans l’ouest canadien. La compagnie ferroviaire commence d’ailleurs projeter, discrètement, les plans de nouvelles installations pour des usines vastes et modernes, possiblement quelque part plus à l’est. D’ailleurs, l’ancien village d’Hochelaga, annexé à la Montréal depuis 1883 ne montre-t-il pas des signes d’une forte activité industrielle?

Entretemps, 3 avril 1922, un incendie se déclare dans l’église du Sacré-Coeur. Le sacristain, monsieur Joseph Lamarche, aperçoit les premiers signes et sonne immédiatement l’alarme. L’abbé Caumartin, vicaire de la paroisse est le premier à répondre et entre dans l’église de par le sacristie pour se rendre compte avec grand effroi que l’orgue au complet était en train de brûler, tel une grande torche dont les flammes tourbillonnaient autour des tuyaux pour s’élever jusqu’au plafond. Avec l’aide des abbés Deschênes, Gagnon et Léonard il sauve les Saintes-Espèces et les habits sacerdotaux.


En moins de cinq minutes une petite armée de pompiers se trouve sur place sous la direction du chef Marin et s’amorce dès lors un combat acharné. Le feu, on le voit bien, prend de l’ampleur et un vent violent active encore davantage l’élément destructeur. Pour le chef Marin il ne fait pas de doute qu’il faut des renforts et il sonne deux alarmes consécutives. Dès lors le chef Chevalier et le sous-chef St-Pierre prennent la relève des opérations. On compte par moins de quarante jets d’eau et il y a bon espoir de circonscrire l’incendie. Malheureusement on aperçoit le feu rejoindre le clocher qui se trouve près de la rue Plessis et bientôt de l’épaisse fumée se dégage du toit du corps principal de l’église. Puis le clocher tombe avec fracas sur le parterre qui donne sur la rue Ontario. Les pompiers commencent à craindre pour le presbytère et leurs efforts se concentrent sur le clocher qui se trouve à côté. Si ce dernier ne peut être sauvé on aura au moins réussi à faire s’épargner le presbytère. Un peu passé 18 :00 on a enfin maîtrisé le brasier mais les sapeurs restent sur place afin de continuer à arroser pendant toute la nuit. S’il y a une chose dont on est certain c’est que le bâtiment est une perte totale. À l’intérieur il ne reste que des tas de cendres et amas calcinés parmi lesquels figurent le grand orgue, les boiseries, les vitraux et quantité d’autres choses. Il faudra tout reconstruire.

Pour les paroissiens c’est là une catastrophe dont on se serait bien passé. Le curé Cousineau, loin de se baisser les bras, a relevé ses manches afin de pouvoir continuer à offrir les cérémonies et autres rituels. On ne s’explique toutefois pas la cause mais on soupçonne le moteur qui actionne les orgues. N’avait-il d’ailleurs pas pris feu au mois de décembre? Heureusement que l’on en avait eu connaissance à temps pour l’éteindre aussitôt à l’aide d’un extincteur.

La loi autorisant la reconstruction de l’église du Sacré-Cœur est alors sanctionnée par la ville de Montréal, alors sous la gouverne du maire Médéric Martin, où l’on mentionne, en préambule, 

«ATTENDU que le curé et les marguilliers de l'Œuvre et fabrique de la paroisse du Sacré-Cœur-de-Jésus, dans la cité de Montréal, ont, par leur pétition, représenté: Que le trois avril 1922, le feu a détruit entièrement l'église et la sacristie de cette paroisse; Qu'il est urgent, pour le bien de la paroisse, de reconstruire et de meubler au plus tôt, sur le terrain de la fabrique, l'église et la sacristie, en utilisant autant que possible les parties de murs, épargnées par le feu, de l'ancienne église et de la sacristie.»

Cette reconstruction délicate on la confie de nouveau à Joseph Venne, lequel réside dans ladite paroisse, mais ce dernier doit travailler avec certaines restrictions d’ordre monétaires. C’est que les pertes sont estimées à quelque chose qui frôle de demi-million et il en faudrait autant, sinon plus, pour tout refaire. L’ennui c’est que les assurances s’élèvent à un montant qui varie entre $175,000 et $180,000. Parmi les sacrifices architecturaux il y aura les clochers, que l’on ne reconstruira pas. Ces derniers demeureront plats.




Le saviez-vous? La façade actuelle de l’église fait partie des éléments architecturaux du bâtiment d’origine qui ont pu être sauvés. Toutefois, durant la reconstruction, d’importants travaux de consolidation ont été nécessaires. 

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