mardi 19 avril 2022

Retour à la maison (bis)

 Dans mon dernier article je parlais de la magie de retourner là où l'on avait grandi. C'était, bien entendu,  une métaphore concernant ce blogue. Après tout, il existe maintenant depuis douze ans! Mais au sens propre, retourner dans la maison de notre enfance exerce une magie qui fait souvent remonter de bien beaux souvenirs. De la nostalgie aussi puisque l'on se remémore, bien souvent, des moments partagés avec des personnes qui nous sont chères et qui nous ont quitté depuis. 

L'an passé je me suis livré à cet exercice puisque je suis allé revisiter la maison qui m'a vu grandir. Les propriétaires ont été, au demeurant, fort intéressés à me recevoir. Cette visite a d'ailleurs permis un échange d'informations intéressantes. Cette maison, sise dans le quartier Hochelaga, a été construite au début des années 40 alors que le Canada venait de déclarer officiellement la guerre à l'Axe. La construction a duré plus longtemps qu'en temps normal étant donné le rationnement de matériaux. Au rez-de-chaussé on compte six pièces (et la demie, bien entendu) et un immense sous-sol, que l'on appelait communément dans le temps, la cave. À l'étage, deux logements de trois pièces qui ont été transformé en un seul loft. Le propriétaire m'a alors confié que lors des travaux d'abattement du mur mitoyen, il avait découvert des médailles religieuses, clouées sur les montants de bois. Nul doute l'oeuvre de mon grand-oncle qui les a placées là afin de protéger la demeure. C'était souvent coutume à cette époque. 

La cour arrière, dans laquelle je me suis si souvent amusé avec mes amis m'a semblé bien petite alors que dans mes souvenirs elle était bien plus grande. L'aménagement de cette dernière a changé mais un détail n'a pas manqué à mes yeux; dans le coin, deux taches de peinture bleue sur le mur. 


La première, au centre, et la seconde, en deux tons de bleu, visible au milieu du boyau d'arrosage. J'ai avoué tout de go au propriétaire que j'étais "l'astiste" de ces deux "chefs-d'oeuvres". Je devais avoir cinq ou six ans lorsque l'idée m'était alors venue de concocter un mélange impromptu de peinture en utilisant je ne souvient plus quoi. Chose certaine, ces "oeuvres" étaient bien tenaces; les tons de bleu étant encore bien vifs. Le propriétaire m'a alors avoué que la cour était en rénovation, d'où la présence de remblai de roche, issu d'un concassage et que le mur de ciment serait éventuellement peinte en blanc. Amusant toutefois de revoir ces traces de mon passage. 


Au balcon, on voit en haut, une photo de mon grand-père prise en 1966 et sur laquelle il est concentré sur ses mots-croisés dont il raffolait. Très intelligent, il les complétait toujours, sans faute. Aujourd'hui, pas grand chose de changé mis à part un support en métal décoratif qui soutient un auvent permanent. Le petit toit à droite est celui de l'entrée qui, de la cour, donnait accès à la cave. 


Le balcon arrière donnait directement dans la cuisine/salle à manger. Souvent, lorsque des gens achètent une maison, surtout lorsqu'elle est un peu vieillotte, ils effectuent des rénovations de masse qui modernisent et changent entièrement l'aspect intérieur, parfois pour le meilleur mais aussi pour le pire. Ici, on a choisi de conserver l'aspect original. Sur la photo du haut, on me voit avec mes deux cousines, alors que je souffle les quatre chandelles de mon gâteau de fête avec, en prime, un petit véhicule de construction Matchbox. 


Sur la photo précédente on notera le lavabo sous la fenêtre. C'est dans ce lavabo en acier émaillé que l'on me donnait mon bain lorsque bébé. Ces lavabos, sous l'usure ou des impacts, voyaient leur émail disparaître à certains endroits ce qui exposait l'acier en dessous et lequel pouvait alors émettre de la rouille. Celui de mon enfance a depuis été remplacé par un autre en acier inoxydable, beaucoup plus durable. 


Partout dans la maison, les propriétaires ont opté de conserver les anciennes poignées en verre biseauté et poli. Cette poignée-là donnait accès à ce que appelait à l'époque la "pantry" ou la dépense. C'est là que ma grand-mère rangeait ses gâteaux, chocolats et autres friandises. Je l'ai tournée cette poignée-là, surtout pour me goinfrer lorsque ma grand-mère était passablement occupée à autre chose. 


Toujours dans la cuisine/salle à manger. Sur la photo du haut on y voit mon grand-oncle prise en avril 1966. C'est là qu'il prenait son thé le matin. À l'époque le calorifère en fonte, comme les autres dans la maison, était peint en blanc. Sur la photo du bas on y voit le même calorifère qui été entièrement décapé et retapé afin de lui redonner son apparence d'origine. 


Détour dans la salle de bain. Photo du haut prise durant l'été de 1970 après une rude journée à jouer dans la terre avec mes fidèles companions Matchbox et Tonka. Photo que j'ai également utilisée dans cet article. La baignoire du temps, en acier émaillé, a été changée, tout comme le lavabo et le mur de céramique quoique que le savonnier soit toujours le même. Ce bain-là en a évacué de la saleté accumulée à jouer dans la cour et la ruelle. 

Un jour de 1970 ma grand-mère a eue cette idée de me faire photographier par un photographe professionnel. Pour l'occasion j'avais revêtu un bel ensemble fort confortable gris et où je chevauchais mon fidèle destrier à roues. À l'arrière, à droite, on aperçoit un autre calorifère (qui a été conservé) ainsi que le déshumidificateur. À ma gauche on voit la tablette en acier et marbre pour le téléphone dont je me souviens encore du numéro, avec, à côté, le calepin de numéros de téléphone. Si le tapis d'époque a été remplacé par un plancher flottant, tout le reste est pas mal d'époque. 


Au salon, deux portes françaises avec de magnifiques carreaux de verre biseauté. On m'a alors confié qu'un des carreaux s'est malheureusement brisé. Au lieu de tout changer ils ont fait appel à un artisan talentueux qui a créé un nouveau carreau avec les mêmes motifs. Appelé à deviner lequel, je n'ai pas pu l'identifer jusqu'à ce qu'il me l'indique du doigt. Puis, on m'a posé une colle; sur le mur qui est là, il y a trois interrupteurs. Nous savons ce que les deux premiers font, mais pas le troisième. Après avoir observé le salon j'ai vite fait de noter que les propriétaires précédents avaient enlevé le luminaire du plafond et c'est cette lumière qui était connectée au troisième interrupteur. Un vieux mystère enfin résolu!

De visiter cette maison de nouveau m'a donné l'occasion de reconnecter avec de vieux souvenirs, de me rappeler mon enfance qui s'y est déroulée. Enchanté aussi de constater à quel point les propriétaires, forts affables au demeurant, ont travaillé à conserver le cachet d'origine. 

Si jamais l'idée vous prend de revisiter l'endroit où vous avez grandi, je vous dis, n'hésitez pas. Sonnez à la porte et vous serez certainement surpris! 



La nostalgie est une émotion qui a été particulièrement étudiée (1) à travers des expériences de psychologie et ces études ont démontré qu'utiliser la nostalgie régulièrement dans sa vie pour se remémorer un épisode en particulier, des gens et des lieux, aide à construire des bases solides pour poursuivre ses objectifs de vie.

(1) Routledge C, Arndt J, Wildschut T, et al. The past makes the present meaningful: nostalgia as an existential resource. J Pers Soc Psychol. 2011;101(3):638-652. doi:10.1037/a0024292




1 commentaire:

  1. La maison de mon enfance à Longueuil à été raté pour faire place à des magnifiques condoléances.

    -Pascal Gibeau

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