samedi 30 novembre 2013

Déclic

Déclic était une émission éducative axée sur les arts et qui était diffusée à Radio-Canada le samedi après-midi à 16h tout de suite après Bagatelle. Il s’agissait en fait de la version française de Vision On, une émission britannique diffusée sur les ondes de la BBC de 1964 à 1976 et qui avait la particularité d’avoir été spécialement conçue pour les enfants sourds. C’est pourquoi l’essentiel de l’émission ne contenait que peu ou pas de dialogues du tout. Le titre de l’émission tirait son nom des enseignes lumineuses dans les studios qui s’allumaient lors d’enregistrements. Le premier était « Vision On», indiquant que les caméras tournaient suivi de «Sound On» mais comme l’émission était axée sur le visuel on a délibérément omis le dernier pour ne garder que «Vision On» qui, tourné à la verticale et doublé, formait le logo, soit une sorte d’insecte sauteur.




L’émission était principalement animée par Tony Hart, un artiste qui créait toutes sortes d’œuvres amusantes avec toute une foule de matériaux différents. Il y avait aussi Pat Keysell, qui travaillait souvent de concert avec Tony Hart, participait aux activités tout en instruisant les enfants sourds. On retrouvait aussi Sylvester McCoy, un mime ainsi que Wilf Lunn, un professeur excentrique inventeur de bidules bizarres. 


 
Un peu à l’instar de Bobino, l’émission était entrecoupée de différents segments tous différents les uns que les autres. Parmi ceux-ci on peut noter le Professeur, lequel était interprété par David Cleveland et qui faisait toutes sortes d’expériences. Tournées en mode accéléré, ces séquences imaginatives et amusantes ont été tournées avec très peu de moyens. 


 
On retrouvait aussi l’ouvrier du chantier de construction. Ce segment animé par Bill Mather mettait en vedette un ouvrier creusant au fond d’un trou et qui parvenait toujours à dégotter des choses intrigantes. Il y avait aussi Auggie le dinosaure, un dessin animé en noir et blanc très amusant créé par Arril Johnson. S’ajoutait à cela Humphrey la tortue, ni plus ni moins qu’une série d’images différentes qui se suivaient avec des dialogues écrits. Mais peut-être le plus amusant était cet espèce de serpent à plumes qui se cachait dans l’horloge et dont il ne sortait que pour foutre le bordel dans le studio. De ce fait il n’est pas sans me rappeler les Psis que l’on voyait dans l’émission Les Oraliens.

Pat Keysell, que j’aimais beaucoup, nous a quitté le 31 octobre 2009 à l’âge de 83 et Tony Hart est décédé le 18 janvier 2009 à l’âge de 83 ans aussi. Sylvester McCoy est toujours vivant, tout comme Wilf Lunn. En terminant, voici quelques unes des différentes séquences musicales utilisées lors des différents segments de l'émission. 
Musique à l'intérieur du pendule :


Musique Humphrey la tortue (l'oreille avertie aura reconnue ici le thème musical de l'émission pour enfants Aglaë et Sidonie mais avec un tempo un peu plus lent) :


La musique entendue lors de la présentation des oeuvres envoyées par les enfants:


Et finalement le générique de la fin de l'émission:





Le saviez-vous?Comme c'est malheureusement souvent le cas pour les vieilles émissions, la grande majorité des épisodes de Vision On produites durant les années 60 plus cinq de 1970 ont malheureusement été perdus.

mercredi 27 novembre 2013

radius et umbra


La foule des vivants rit et suit sa folie,
Tantôt pour son plaisir, tantôt pour son tourment ;
Mais par les morts muets, par les morts qu'on oublie,
Moi, rêveur, je me sens regardé fixement.

Ils savent que je suis l'homme des solitudes,
Le promeneur pensif sous les arbres épais,
L'esprit qui trouve, ayant ses douleurs pour études,
Au seuil de tout le trouble, au fond de toute la paix !

Ils savent l'attitude attentive et penchée
Que j'ai parmi les buis, les fosses et les croix ;
Ils m'entendent marcher sur la feuille séchée ;
Ils m'ont vu contempler des ombres dans les bois,

Ils comprennent ma voix sur le monde épanchée,
Mieux que vous, ô vivants bruyants et querelleurs !
Les hymnes de la lyre en mon âme cachée,
Pour vous ce sont des chants, pour eux ce sont des pleurs.

Victor Hugo,
Les rayons et les ombres, extrait
Mars 1840

lundi 25 novembre 2013

Hé Frank!















J'ai fait cette petite bédé sans prétention il y a quelques années et l'idée m'est venue en tête alors que j'étais... chez le dentiste sous anesthésie et souhaitant évidemment être bien loin de là. J'ai initialement dessiné cette bande au crayon mine 2B dans une version un peu plus longue de quelques cases dans un style quelque peu différent et je ne sais plus ce que j'en ai fait (je vais les retrouver un jour!) alors je les ai redessiné peu de temps après. L'idée d'encrer la deuxième version ne m'est venue qu'il y a quelques mois et pour ce faire j'ai utilisé un crayon feutre Faber Castell Pitt de grosseur S, que j'aime bien. Par contre, pour des tracés plus fins j'aime mieux utiliser un Pilot Drawing Pen #2 ou #1.


 

Saviez-vous ça vous autres? Les requins, les crocodiles pis les alligators là, ben y'ont des réserves infinies de dents. Enlevez-leur les touttes autant de fois que vous voudrez ça va tout l'temps repousser comme si de rien n'était.

samedi 23 novembre 2013

november


Novembre a beau être ce mois terne, frisquet et gris dédié aux Morts, il n'en demeure pas moins que j’aime me perdre dans les méandres des cimetières durant ce temps, surtout Notre-Dame-des-Neiges. J’ai beau apprécier, avec le cœur d’un enfant, les représentations humoristiques et théâtrales qu’on fait de ces lieux durant le temps de l'Halloween ou autre, il n’en demeure pas moins que la réalité est toute autre. Il y a, au détour des nombreuses allées, une nature grouillante de vie, un calme absolu et une atmosphère qui appelle à la réflexion sur ce qui nous attend éventuellement tous. Mais un cimetière c’est également un musée à ciel ouvert, magnifique dans la richesse des œuvres qu’on y retrouve. De nombreuses pierres tombales sont ornées de toute une foule d’éléments symboliques qu’il est intéressant de décortiquer. Un de ces éléments que l’on retrouve abondamment est l’ange, défini dans la Bible comme un messagers de Dieu. Leurs poses ne sont toutefois pas le fruit d’un hasard issu de la simple créativité des artistes qui les ont conçus, bien au contraire. Ceux, comme celui d’aujourd’hui, qui sont pensifs et songeurs, représentent le chagrin et le deuil mais peuvent aussi signifier la sûreté offerte par la spiritualité.



Le saviez-vous? Le cimetière fut fondé en 1854 sur des terres données par le docteur Pierre Beaubien afin de remplacer le cimetière St-Antoine, lequel était devenu trop petit. La première personne inhumée fut Jane Gilroy le 29 mai 1855.


mercredi 20 novembre 2013

nauticis


Publicité peinte sur le mur ouest du bâtiment se trouvant à l’intersection des rues de la Commune et St-Sulpice. Il s’agit du commerce de Kelvin Bottomley, un commerçant d’instruments nautiques et dont le gérant était un marin, le capitaine Andrew. Il nous vient peut-être en tête les images de ces gros navires accostant le port comme dans ces belles toiles d'Adrien Hébert alors qu'il se trouvait encore, ici et là le long des quais, de ces magnifiques bateaux à voiles comme il y en avait tant jadis. Contrairement à ce que l’on serait porté à croire, ce commerce est relativement récent puisqu’il date d’environ 1930.C'était l'époque où il se trouvait encore de nombreux magasins-entrepôts et où le Vieux-Montréal était encore loin d'avoir sa vocation récréo-touristique qu'on lui connaît aujourd'hui. C'était le Vieux-Montréal des industries, des grands élévateurs à grains et des marchés publics. Malheureusement pour cette publicité, et comme pour tant d'autres dans le coin, elle ne sera plus, d'ici peut-être une vingtaine d'années, qu'un vague souvenir. Le temps et les éléments en auront eu raison.





Saviez-vous ça vous autres? En 200 ans, au large des côtes de Galles (à pas confondre avec les côtes du Rhone ou celles de bœuf), y’a eu trois bateaux qui ont coulé exactement à la même place à la même date, soit un 5 décembre. Plus que ça, à chacun de ces trois naufrages-là y’a eu juste un seul survivant. Leurs noms? Les trois s’appelaient Hugh Williams. Ben pour dire, hein?

lundi 18 novembre 2013

somnium


Je me souviens du moment où j’ai pris cette photo qui m’a rappelé du coup un rêve que j’ai eu la nuit d'avant et dont l’image aurait pu avoir été tirée.

Je me trouvais sur une île, que je n’avais jamais vue ni visitée de ma vie. Le ciel était gris avec des nuages presque noirs. Le bruit du vent dans les hautes herbes où je me trouvais n’était accompagné que par celui du ressac, plus bas. Entre mes mains, des lettres adressées à mon intention et écrites par le fantôme d'une fille dont j’ignorais l’identité. Elle errait quelque part sur cette île sans que je ne sache où. De temps à autre je m’arrêtais pour lui écrire et ensuite faisais des petits bateaux avec les lettres, que je laissais flotter dans l’eau pour qu’ils se rendent jusqu’à elle. J’ai continué mon chemin le long de l’anse jusqu’à la maison abandonnée d’un pêcheur qui avait depuis longtemps quitté l’île et qui était maintenant habitée par un corbeau. «Je parcours l’île depuis les nuages et je sais où se trouve celle que tu cherches». Il allait me le dire lorsque le réveil a sonné.

 

Le saviez-vous? Dans la mer d’Arabie il se trouve une île qui porte le nom de Socotra. Il y existe 825 variétés rares de plantes et où 90% des espèces de lézards et 95% des espèces d’escargots ne se retrouvent nulle part ailleurs dans le monde.

mercredi 13 novembre 2013

nudus XX


Si dans la paix et la grandeur des midis clairs
L'une de vous, soudain, s'arrête et plus ne bouge,
Elle apparaît debout comme un tyrse de chair
Où flotterait le pampre en feu de ses crins rouges.

Lasses, quand vous dormez dans la douce chaleur,
Votre groupe est semblable à des barques remplies
D'une large moisson de soleil et de fleurs
Qu'assemblerait l'étang sur ses berges pâlies.
  
Émile Verhaeren
La multiple splendeur (extrait)



Le saviez-vous? Benjamin Franklin, Agatha Christie et Ernest Hemingway avaient l’habitude d’écrire nus.

lundi 11 novembre 2013

subito imbre


Lorsqu’on lui a confié la réalisation d’une sculpture pour l’Exposition Universelle de 1967, Jean Cartier, céramiste, artiste et professeur de renom, s’est exécuté de main de maître. Pour l’évènement il conçoit La Giboulée, une œuvre qui lie admirablement bien les thèmes chers tels que définis par les organisateurs soit les milieux naturels, les sciences et la culture. Une vasque en béton sert de support à une multitude de tubes en métal enchâssés dans des cônes en ciment. Du haut de ces tubes, chacun muni de disques en verre situés à différentes hauteurs, s’échappe de l’eau qui jaillit sur les disques, créant un effet visuel saisissant, surtout le soir alors que l’œuvre est éclairée d’un dispositif conçu spécialement.

L’œuvre est installée en 1967 à l’extrémité ouest de la Cité du Havre au centre de la Place des Rapides où elle clôt l’allée piétonnière tout en faisant office de complément aux bâtiments environnants. Elle est évidemment admirée et abondamment photographiée. Les choses se sont gâtées quelque peu après alors que sont disparus les pavillons environnants tels l’Expo Club, le pavillon de l’Hospitalité et celui des Jeunesses Musicales. Les lampadaires, devenus inutiles, sont décapités à la torche sans trop de cérémonie et leurs bases jonchent alors les allées abandonnées et qui ne mènent plus nulle part. Au milieu de tout ça, dans un coin qui est devenu une sorte de Mordor montréalais, la Giboulée est délaissée et on ne s’en occupe plus. Du tout. La Place des Rapides est aujourd’hui en friche et l’œuvre a non seulement été victime du temps mais également des vandales qui l’on bien saccagée comme en témoigne son état de décrépitude avancée. La sculpture est tellement tombée dans l’oubli qu’elle ne figure même pas au catalogue des œuvres d’art public de la ville de Montréal. Nul doute qu’il en sera ainsi pendant encore longtemps et on pourrait facilement parier que c’est un bulldozer qui règlera la question parce qu’en ce qui concerne le patrimoine de Montréal ces grosses machines n’ont jamais chômé bien longtemps.



Saviez-vous ça vous autres? Jean Cartier là, ben c’est celui qui a fait les céramiques au métro Papineau en ’66 pis au métro Cadillac en ’76. Pis une autre affaire, le prix de céramique du Conseil des métiers d’art du Québec? Ben ça porte son nom. Faque.


samedi 9 novembre 2013

La Place Versailles

 (Photo: Archives de la ville de Montréal)
Cette année la Place Versailles fête ses 50 ans. Ce n'est certes pas le plus vieux centre commercial de la région montréalaise, loin de là, mais c'est tout de même le premier à avoir été conçu dès le départ pour être entièrement à l'intérieur. Avant ça, un centre d'achats, comme on les appelait, n'étaient qu'une filée de magasins soudés les uns après les autres où l'on devait se déplacer à l'extérieur pour visiter les boutiques. Il s’en trouve plusieurs qui ont conservé cette formule, comme le centre d'achats Maisonneuve sur la rue Sherbrooke, alors que d’autres, parce qu’ils avaient de l’espace pour le faire (et le budget) ont été convertis pour devenir intérieurs. Le centre d'achats Boulevard au coin de Pie-IX et Jean-Talon en est un bon exemple; extérieur à son ouverture en 1953 on l’a par la suite modifié pour qu’il soit intérieur. Le concept «tout intérieur» repose quant à lui très largement sur celui du Southdale Center, qui vit le jour en 1956 à Edina dans la banlieue de Minnesota.

Dans le temps on retrouvait à la Place Versailles tout plein de magasins qui ont aujourd'hui tous disparu. Il y avait La Baie, un Miracle Mart remplacé plus tard par M, une quincaillerie Pascal avec sa grosse devanture entièrement faite d'outils peints en noir, un Toy World, un Distribution au Consommateur, Steinberg et bien d'autres.Les plus vieux vont aussi se souvenir du cinoche qui s’y trouvait et qui était dans un bâtiment séparé du centre commercial. Un très beau cinéma dont le lobby était très élégant avec de grandes vitres qui montaient jusqu'au plafond avec de grands rideaux. Trois ou quatre salles je crois. On peut d'ailleurs en apercevoir encore la partie arrière sur la rue du Trianon tout juste au nord de Faradon. 

 
L'arrière de l'ancien cinéma, tel qu'il apparaît aujourd'hui sur la rue Faradon.

Lorsque l’on a agrandi le centre commercial on a tout simplement choisi d’éventrer le bâtiment et d’y loger les nouvelles boutiques, ce qui est un dommage parce que je l’aimais bien moi ce cinoche. Il avait de la gueule. Pendant de nombreuses années aussi il y a eu une arcade Le Jeu installée dans un long corridor menant à la rue du Trianon. Lors de l’agrandissement on l’a déménagée dans un nouveau local près de l’entrée plus au sud mais elle n’a pas fait long feu. C’était d’ailleurs l’époque où les arcades fermaient les unes après les autres en ville, victimes de la popularité des consoles de jeu. On a aussi ouvert un deuxième cinoche dans la nouvelle section mais celui-ci a fermé quelques années plus tard.

Mais le truc le plus innovateur fut, dès 1966, l’intégration de deux œuvres d’art originales commandées à l’artiste mexicain Augusto Escobedo. Il mit quatre mois à les réaliser et elles furent dévoilées (sans voile) en juin de cette année-là en présence de l’artiste, du consul du Mexique ainsi du directeur délégué aux spectacles d’Expo 67, John Pratt.

La première est une variation intéressante des Trois Grâces de Raphaël et que l’on a installé au milieu d’une fontaine située à l’entrée principale. Trois femmes nues dansent en rond en se tenant par les mains. Et ,contrairement à ce que l’on pourrait croire elles ne sont pas en bronze mais bien en résine de polyester façonnée ainsi pour en donner l’apparence. Quoiqu’il en soit cette sculpture se trouve toujours à son emplacement original de 1966.

 Les Trois Grâces, telles qu'elles apparaissaient dans les années 60 et 70. (Photo: Collection personnelle) 

La seconde sculpture se trouvait à l’époque tout près, dans le corridor allant vers l'ouest, tout juste en bas du petit l'escalier. Il s'agissait en fait d'une installation assez élaborée qui comprenait une muraille de pierre parsemée de plantes et où de l'eau jaillissait de plusieurs endroits pour tomber dans un bassin où s'amusaient quatre enfants nus. 

 Joie de vivre, telle qu'elle était installé jusqu'à son démantèlement et relocalisation. (Photo: Collection personnelle) 

Et ces sculptures n'ont pas fait scandale? Mais non. On commençait à se réveiller au Québec. Mais on savait toutefois que ces sculptures allaient [possiblement] faire jaser alors un journaliste a interrogé les gens afin de savoir ce qu'ils en pensaient, justement.

Une dame d'un certain âge a dit «...c'est bien joli, j'aime bien ça». Un autre a dit «...c'est moderne, c'est agréable à voir, ça fait un joli coup d'œil en entrant dans le centre d'achats et c'est flatteur pour les yeux». Une jeune maman a trouvé quant à elle que «...c'est un excellent endroit pour placer d'aussi jolies œuvres d'art. C'est une bonne idée d'installer ainsi des sculptures dans un centre d'achats. Il n'y a rien de scandaleux là-dedans.»

 Des enfants s'amusent à regarder Joie de vivre ainsi que sa muraille de végétation, ses jets d'eau et ses jeux de lumières.



Une jeune maman anglophone a pour sa part trouvé que c’était un excellent endroit pour placer d’aussi jolies œuvres d’art, que c’était une bonne idée d’installer ainsi des sculptures dans un centre d’achats et qu’il n’y avait rien de scandaleux là-dedans. Quant à trois jeunes écolières elles trouvaient que c’était joli et beau.

«Ça ne vous choque pas?» A demandé le journaliste.

«Ben pourquoi donc? Pas du tout. On aimerait ça en voir un peu partout. La ville a l’air assez plate! Ça ne ferait pas de mal.» (Que doivent-elles penser de la ville aujourd’hui?!)

Pour une autre jeune femme celle-ci trouvait les dames un peu disproportionnées mais qu’elle n’y trouvait rien de choquant ou de scandaleux, au contraire. Un jeune couple de trouver que c’était très original, que c’était bien de mettre ainsi des œuvres d’art dans un centre commercial parce qu’ils n’avaient pas toujours le temps d’aller dans les musées ou les galeries d’art pour en voir.

Aujourd’hui les Trois Grâces sont toujours là, à leur emplacement original sauf qu’on a refait le bassin dans lequel elles se trouvaient. On ne peut pas en dire autant de la sculpture des quatre enfants jouant dans l’eau. Quelque part durant les années 80 le centre commercial s’est agrandi et quelqu’un, quelque part dans la direction, a trouvé que la sculpture prenait trop de place et qu’on pourrait y aménager des magasins à la place. Et c’est exactement ce qu’on a fait.

Mais plutôt que de simplement la déplacer intégralement ailleurs on a carrément décidé de la démanteler au complet. Bing pouf crac! Seuls les enfants ont été conservés et le reste a probablement fini aux poubelles. Puis un jour ils se sont retrouvés ailleurs comme ça dans une autre fontaine, placés un peu n’importe comment, sans éclairage adéquat qui puisse les mettre en valeur. 

 Joie de vivre, telle qu'on peut la voir dans son emplacement actuel, parfaitement vidée de tout son sens.

L’œuvre d’Escobedo était visuellement riche et reposait sur l’ensemble de tous les éléments qui la composaient. Lors du «déménagement» les enfants se sont retrouvés dans un environnement vide, parfaitement dénaturés et l’œuvre s’est vite trouvée vidée de tout son sens. Depuis ce temps l’œuvre d’Escobedo n’en est plus une. C’est un peu comme si un musée enlevait le cadre original d’une œuvre majeure pour lui en mettre un acheté au magasin d’un dollar pour ensuite l’accrocher près des toilettes.

Du reste, mis à part les Trois Grâces, il ne se trouve que très peu d’éléments originaux de la Place Versailles qui existent encore. Les planchers des allées, les accès et les facades ont été considérablement refaits au fil des ans. Par contre il y a ces distributrices de sacs un peu partout dans le centre commercial et qui sont parfaitement d’époque. Les sacs, aujourd’hui en plastique, étaient à l’époque en papier épais mais le design stylisé de la femme sur le sac est demeuré inchangé depuis les années 60.



Le saviez-vous? La place Versailles soit son nom à l’ancien maire de Montréal-Est, Joseph Versailles. On lui doit essentiellement le développement urbain et industriel de tout ce secteur. Il est décédé en 1931.

jeudi 7 novembre 2013

Le plaisir de collectionner


Il y a de cela quand même un bon bout un copain m'a passé un coup de fil comme ça (tiens, voilà une autre de ces expressions que bien des jeunes ne connaissent pas). Il était bien content de m'annoncer qu'il s'en allait dans un condo avec sa copine. C'est après m'avoir annoncé son déménagement qu'il m'a demandé une faveur. J'entrevoyais déjà la demande d'aide au déménagement avec un pizza «gratis» au bout. Pantoute. En fait c'est que lui et sa copine demeuraient, à ce moment-là, chacun dans leurs appartements respectifs et que pour aménager dans un condo ils devaient se débarrasser de tout un fourbi de trucs dont certains qu'ils avaient forcément en double. Là j'ai craint qu'il me fasse l'éventail de cossins à vendre "pas cher". Tiens, tu veux un frigo? il coule un peu mais il est encore bon. Une laveuse à linge? Elle tonne comme un bombardier de la deuxième guerre mais elle a encore au moins quelques bonnes années devant elle.

Je préparais ma liste de réponses du genre: pas vraiment, non merci, t'es bien gentil mais.

Rien du genre. En réalité il avait une boîte à me donner.

L'ami savait que je m'intéressais un peu (beaucoup) aux vieux jouets et m'avoua comme ça que sa boîte ne contenait que des voitures Hot Wheels et peut-être aussi quelques Matchbox qu'il avait acheté dernièrement juste pour le plaisir de la chose et là il voulait me les donner, tout simplement.

Ok, que je lui ai dit, amène-la ta boîte.

Alors c'est comme ça qu'il s'est pointé chez-moi par un samedi matin pour venir me porter sa boîte. L'erreur fondamentale a probablement été de ne pas lui avoir demandé de quelle sorte de boîte il s'agissait. Peut-être un peu bêtement, sans trop de clairvoyance, j'avais imaginé une boîte à chaussures ou une boîte de mijoteuse. Quelque chose comme ça.

Tout sauf une boîte assez grosse pour servir de condo à mon chat.

Et puis il est reparti, tout bonnement avec la satisfaction d'un facteur qui vient de domper une tonne de circulaires dans le portique d'un bloc de cinquante-douze étages.

Un peu découragé par les dimensions j'ai mis la boîte dans la cuisine. Je l'ai regardé pendant un certain temps puis, curiosité oblige, je l’ai ouverte. Les voitures, toutes dans leur emballage, avaient été soigneusement empaquetées jusqu'à ras bord. J'en ai sorti quelques unes au début mais après un certain temps je me suis assis, à les regarder attentivement, à les tourner dans tous les sens, à observer les détails, les variations.Sans même le réaliser j'avais passé la soirée à bizouner avec ces voitures.

Quelques mois plus tard je me suis retrouvé dans un magasin de grande surface avec un ami. Curieux de voir comment le monde des petites autos avait évolué, j’ai bifurqué dans la section des jouets, à la très grande surprise et étonnement de l’ami. Puis je me suis arrêté devant les Hot Wheels et les Matchbox, que je me suis mis à regarder. L’ami étant demeuré dans l’allée, m’observant de loin en se grattant la tête et aussi avec un air quelque peu inquiet. Il semblait bien se demander ce que je faisais là à farfouiner comme ça. Mais lorsqu’il m’a vu revenir vers lui avec quelques voitures il a écarquillé les yeux en affichant une mine horrifiée, comme si je venais de prendre des revues porno. Je ne suis pas avec lui, qu’il semblait vouloir dire aux gens qui passaient qui eux, n'en avaient rien à cirer.

Ben quoi? Que je le lui ai dit. Tiens, regarde celle-ci, une Mustang Fastback 1967. Et là tu vois, un Plymouth Road Runner 1971 ainsi qu’une Studebaker Avanti. Pas mal non?

Son air parfaitement consterné laissait clairement transpirer son opinion sur mes trouvailles. Puis il a froncé les sourcils, comme pour questionner mon degré de maturité. J’ai pris quelques instants pour lui raconter l’histoire de la fameuse boîte que l’ami m’avait donnée et comment les voitures qui se trouvaient à l’intérieur avaient créé cette petite étincelle qui m’avait fait reconnecter avec ces petits moments de bonheur de l’enfance, à cette époque où je n'étais qu'un gamin, sorte de bruit recouvert de saleté, et qui virait complètement fou braque devant les étalages Hot Wheels et Matchbox du Bric à Brac alors qu'on me disait que je pouvais en choisir deux. Et que dire de tous ces morceaux de journées où, étendu dans le salon, je m’amusais comme un fou à faire défiler les voitures sur ma piste motorisée Hot Wheels ou encore ces longs moments à les manipuler, ouvrir capots et portières pour en admirer tous les détails. Sans parler des échanges que mes amis et moi faisions avec tant de passion dans la cour arrière.

Il n’y a pas de différence, lui ai-je dit, entre collectionner des voitures miniatures et n’importe quoi d’autre, puisque ce n’est pas tant ce qu’on collectionne qui est important mais plutôt le plaisir qu’on en retire. Et être collectionneur de petites voitures c’est faire un peu partie d’une communauté internationale large d’un peu plus de douze millions de gens, jeunes et vieux, hommes et femmes (si!) et qui s’adonnent à ce p’tit hobby ma foi fort amusant. 
Peu de temps après le téléfon a retontit. C’était l’ami. Il avait des courses à faire et me demandait si je voulais bien l’accompagner. Sur place j’ai évidemment visité les étalages de petites voitures où j’admirais les nouveaux modèles. Avec trois voitures dans les mains j’attendais à la caisse lorsque je me suis retourné pour parler à l’ami. Et que tenait-il dans ses mains? Trois voitures Hot Wheels.

« Salaud! » M’a-t-il dit en souriant. 




Le saviez-vous? Il se vend aux États-Unis plus de 8 millions de voitures Hot Wheels par mois et que si toutes les voitures fabriquées depuis 1968 étaient mises l'une à l'arrière de l'autre elles feraient quatre fois le tour de la Terre. 

dimanche 3 novembre 2013

Caverhill Learmont


Une imposante façade de pierre de taille se dresse sur la rue Saint-Pierre, tout juste au sud de Notre-Dame. S’y retrouvent pilastres, colonnes, frises, cordons, châssis à guillotine et à battant, tous des éléments élaborés tels que les ont conçus les architectes Cyrus Pole Thomas et William Tutin Thomas en 1865-66. Et sur le côté nord, de brique celui-là, on y voit encore la trace de la compagnie qui occupait les lieux il y a bien longtemps : Caverhill Learmont. Il s’agissait d’une quincaillerie qui fournissait tant aux particuliers qu’aux compagnies dont le Canadien Pacifique. Son unique propriétaire, George Simpson, habitait une magnifique résidence sur la rue Simpson dans le secteur que l’on appelait Golden Square Mile, où résidaient alors les plus riches du pays. La maison n’existe malheureusement plus, ayant été démolie il y a longtemps.

George Caverhill a un jour vendu la quincaillerie pour se lancer dans le monde de la finance en devenant, entre autres, directeur de la Canada Steamship Lines, propriétaire de la Montreal Loan & Mortgage Company, directeur de Bell Telephone, directeur de la Montreal Tramways Company et vice-président de la Canadian Cotton. Il siège aussi au conseil d’administration de la Montreal, Light, Heat & Power à laquelle sont aussi lié deux de ses bons amis soit Louis-Joseph Forget et Herbert Holt. Il est décédé en 1937 à Montréal et repose au cimetière Mont-Royal.




Parlant d’outils, saviez-vous que les raton-laveurs peuvent déverrouiller des choses complexes en dix essais et lorsqu’ils trouvent la solution ils s’en souviennent en moyenne pendant 3 ans.