vendredi 22 septembre 2017

Butorides virescens

Le héron vert est un oiseau échassier qui fait partie, vous l'aurez deviné, de la grande famille des hérons. On retrouve principalement ces oiseaux le long d'un cours d'eau, d'un lac ou d'un étang puisque leur diète se compose de poissons, d'amphibiens et d'insectes. Il mesure environ 44cm, soit plus petit que son cousin le héron bihoreau. J'ai rencontré mon héron vert bien par hasard durant une promenade. 

Petite histoire en quelques temps. 

Le voilà, sur un billot flottant au milieu d'un étang. Cet endroit est de loin supérieur au rivage car il donne au héron vert une vue à 360 degrés, ce qui multiplie ses chances d'aperçevoir un poisson et de le capturer. Durant la belle saison ce billot est un peu tel cette station service/halte routière pour différentes espèces d'oiseaux comme les canards colvert, les canards branchu, les grives et aussi pour les tortues peintes. De temps à autres, quelques espèces s'y côtoient allègrement, profitant du soleil. Mais aujourd'hui, seul le héron vert s'y trouve. 

Après avoir arpenté le billot de long en large sans avoir aperçu de poisson quelconque, le héron s'est offert une libellule en guise d'amuse-gueule (ou amuse-bec?). Ils sont habiles au point de pouvoir happer un insecte en plein vol. Une fois l'insecte avalé, le héron a redémarré son radar à poisson. 

Le héron vert est drôlement astucieux et on peut le constater ici en le voyant agiter un bout de nénuphar avec son bec à la surface de l'eau afin d'attirer un poisson. Après l'avoir agité il a observé patiemment, puis, il a recommencé. 

Après plusieurs essais infructueux avec le nénuphar, il a soudainement vu quelque chose d'intruiguant. Serait-ce le poisson tant convoité? Une petite barbotte ou encore une carpe? Il avance méthodiquement sur le billot tout en fixant solidement ce qu'il a repéré. 

Voici une particularité physionomique fort intéressante du héron vert; sa capacité à pouvoir s'étirer le cou de façon presque démesurée. Avec les pattes solidement ancrées dans le billot, il s'étire ainsi le cou afin de déterminer si le jeu en vaut la chandelle. 

Il plonge pour un quitte ou double. Soit il ressortira de l'étang bredouille ou il aura de quoi festoyer. On notera que les hérons verts, tout comme les autres oiseaux échassiers, ne possèdent pas de pattes palmées car pour eux, l'eau ne sert qu'à plonger très brièvement, contrairement aux oies, canards et autres palmipèdes. Maintenant c'est le moment de suspense et j'attend qu'il retourne sur le billot pour voir le résultat. 
Et voilà! Il vient de saisir une carpe. À l'aide de ses puissantes ailes, il sort de l'eau afin de déguster son repas. Quelle chasse! Heureusement pour lui, il n'y a pas eu d'autres hérons verts ou d'oiseaux d'autres espèces qui sont venus l'embêter. Lorsqu'il pêche comme ça, il ne tolère absolument pas la présence d'autres oiseaux à proximité. 

Une fois revenu sur le billot, il s'est arrêté pendant environ une minute, probablement à se demander s'il allait manger son poisson là ou ailleurs. Que va t-il faire? 

Au final, il a décidé de s'envoler et j'ai bien cru qu'il irait se percher à la cime d'un arbre pour ne pas être importuné. Toutefois, c'est pratiquement à mes côtés, à la hauteur de mes yeux qu'il s'est installé. Il ne faut pas craindre quant à la taille du poisson, sitôt après avoir pris cette photo il l'a avalé d'un coup. Et hop! dans l'estomac. 

Le repas est maintenant terminé et il se demande probablement s'il prendrait maintenant un petit digestif. Il est donc resté comme ça sur la branche pendant plusieurs minutes, la panse bien remplie. Quant à moi, j'ai considéré avoir pris assez de photos et lui ai souhaité bonne fin de journée afin de reprendre ma promenade. 

Avec un peu de chance, on peut apercevoir des hérons verts à quelques endroits à Montréal dont le Technoparc, le parc Angrignon, le parc de l'île de la Visitation et au parc des Rapides, à Lasalle. Toutefois, il est fort possible de l'observer ailleurs. 




Le saviez-vous? L'aire de répartition du héron vert, qui comprend la côte est Nord-américaine, le Mexique et l'Amérique centrale, se réduit d'année en année. il doit actuellement faire face à l'assèchement et à la raréfaction des zones humides dû à l'urbanisation galopante. 

lundi 18 septembre 2017

Les comptoirs de lunch Woolworth

Si vous êtes abonnés à ma page Facebook vous savez sans doute que j'y partage souvent des choses qui n'apparaissent pas nécessairement ici. C'est le cas récemment d'une photo d'un vieux comptoir de lunch où je demandais comme ça si les gens étaient assez vieux pour s'en rappeler. voici d'ailleurs la photo en question. 

Cette photo a été aimée par presque de 800 personnes et pas moins de 310 personnes ont écrit un commentaire afin d'attester que oui, elles se souvenaient bien de ces longs comptoirs à lunch. Certains parlent de leur emplacement favori, d'autres leur morceau de menu préféré alors que d'autres mentionnent y avoir travaillé. Tous les commentaires, sans exception, témoignent des merveilleux souvenirs dont voici quelques extraits:

«Ma mère m'amenait au comptoir chez Woolworth ou Kresge sur Ste-Catherine après la visite chez l'optométriste. Les meilleurs sandwich et sundae de mon enfance.»

«J'adorais aller manger à ces endroits avec mes amis, la nourriture était bonne, et l'ambiance spéciale, dommage il n'en reste même pas un.»

«Yup... travaillé comme étudiant dans un Woolworth qui en avait un !!! La tarte aux citrons était dangereusement bonne pendant les pauses !!!»

«À Alma, il y en avait un chez Woolworth et chez Continental. J'aimais bien quand ma mère m'y amenait manger une frite ou un sundae.»

«Je me souviens très bien du Woolworth sur la rue St-Dominique à Jonquière. Quel bonheur lorsque nous prenions un jus de raisins avec un beigne au miel.»

«Et c'est à un tel comptoir du Kresge de Val-d'Or que j'ai mangé mon premier hot chicken!!!! Hummmmm!»

«Quand j'avais 16 ans, j'étais caissière chez Kmart à Arvida et pour dîner, je mangeais toujours un fish & chips au comptoir....»

«Oh que oui chez Kresge et aussi chez Woolworth sur la rue sainte Catherine je me souviens du super bon chausson au pomme et sirop mais surtout de ma tante Pauline qui y travaillait serveuse au comptoir .. un de mes bons souvenirs d enfance...»

«Omg!!!!!! Woolworth rue Ste-Catherine ouest j'y mangeais la meilleure salade de macaroni en ville!!!!!»

«Oui je travaillais là sur la rue Arnauld à Sept Iles dans les années 60 !!! Quels beaux souvenirs que me reviennent en tête !!!!!»

«J'ai travaillé chez Woolworth Jean-Talon et Pie lx à la comptabilité pour la fontaine et la pâtisserie, je remplaçais durant à la fontaine et la pâtisserie durant les pauses à l'été de 1955 à 1958.»

«J'ai travaillé chez Woolworth à St.Henri et je gagnais .05 de l'heure de plus que le salaire des autres car je parlais anglais....et plus tard, rue Wellington à Verdun, prendre un coke fontaine et un apple dumpling.....avec les 2 enfants dans le carrosse..........c'était le bon temps.»

Comme on peut le constater avec cette sélection choisie parmi les 300 commentaires, ces fameux comptoirs n'ont pas manqué de laisser de magnifiques souvenirs dans la mémoire des gens qui ont connu ces comptoirs. Bien entendu, si vous faites partie des générations plus jeunes, il y a fort à parier que vous n'avez jamais connu ce genre de chose et croyez-moi, vous avez malheureusement manqué une bien belle expérience. Alors que sont ces comptoirs à lunch et d'où ça vient?

L'idée origine des grands magasins F.W. Woolworth, une chaîne de magasin fondés aux États Unis en 1878 à Utica, dans l'état de New York. En 1904 on retrouve six chaînes Woolworth et la division canadienne est établie à North York en Ontario dans les années 20. Ce sont alors des magasins à aubaines qui ont démarré la mode des magasins à bon marché et qui inspiré plus tard les fameux 5-10-15, nommés ainsi parce que tous les items étaient vendus à 5, 10 ou 15 sous et pas plus. Woolworth est en quelque sorte l'ancêtre lointain des magasins à un dollar qui font fureur aujourd'hui. 

Puis, quelqu'un, quelque part dans le service de direction de Woolworth, et sans que l'on ne sache qui très exactement, a une idée. Les client qui vont et viennent à la recherche d'aubaines ont parfois un petit creux. Pourquoi ne pas aménager un service de restauration sur le pouce où ils pourraient grignoter un petit quelque chose afin de s'emplir la panse pour ensuite continuer de magasiner tout ragaillardis! Avec un menu facile et peu dispendieux on attire aussi les gens qui veulent casser la croûte rapidement et en finissant ils passent aux travers différents départements qui les incitent à économiser sur différents produits aux prix alléchants. C'est une formule gagnante/gagnante qui n'est pas sans rappeler pourquoi les supermarchés mettent leurs comptoirs laitiers aussi creux dans leurs magasins, c'est pour vous tenter avec tout plein de spéciaux chemin faisant. 

Le concept est très simple en soi et s'appuyait essentiellement sur l'intégration d'un comptoir à lunch comme on en retrouvait ailleurs et qui avaient pignon sur rue. À Montréal on peut penser au fameux Montréal Pool Room par exemple. À quelques différences notables, toutefois. Ainsi, le comptoir-client et l'aire de préparation des aliments était beaucoup plus longs. Cette dernière était tout aussi étroite et comportait tout ce qu'il fallait de ça et là afin de servir les gens rapidement; fontaines de boissons gazeuses, réfrigérateurs, grille-pains... Voici d'ailleurs un menu typique de 1957:

Comme on peut le voir, il ne se trouve ici rien de bien compliqué à préparer. La plupart des éléments sur ce menu peuvent être préparés et servis en quelques minutes à peine. Les ingrédients comme le poulet, le jambon, le bacon et les œufs sont tous préparés à l'avance et conservés dans des réfrigérateurs. 

Ici on peut voir un Woolworth de Toronto photographié en 1958. Cette vue en plongée nous permet de mieux voir comment tous les éléments étaient disposés de façon à pouvoir servir rapidement la clientèle. On note aussi la présence de cloches à gâteaux directement sur le comptoir, de quoi certainement aiguiser l'appétit. Quoiqu'il en soit, le concept fait fureur et les clients emplissent les tabourets tournants. À Los Angeles le succès était tel que le comptoir du Woolworth comptait pas moins de 100 tabourets.  

Malgré les années, le succès ne dérougit pas, comme on peut le voir sur cette photo prise au début des années 70 où il n'y a aucune place libre. On note, avec amusement, que les grands spéciaux se trouvent tout juste derrière les tabourets. 

L'idée de Woolworth fait des petits et bientôt d'autres magasins emboîtent le pas en dotant leurs propres magasins de comptoirs à lunch parfaitement identiques. Ici à Montréal ce sont des magasins Greenberg, United, Kresge et plus tard Woolco. D'autres magasins, tels Eaton et Simpson's préfèrent avoir de véritables restaurants et cafétérias mais dans des zones bien définies. 

On peut admirer ici une variante intéressante. Plutôt qu'avoir des tabourets on a tout simplement installé des banquettes directement au comptoir avec une ouverture basse afin de mieux y faire passer les assiettes. Chaque banquette est assortie de sa patère pour y accrocher son manteau. Ces banquettes ne prennent qu'un peu plus d'espace que les tabourets mais en retour la clientèle y est installée beaucoup plus confortablement.

Les comptoir à lunch ne sont pas uniques à Montréal, bien entendu, mais ils ont certainement fait partie du paysage pendant de très nombreuses années. Malheureusement le concept des comptoirs à lunch popularisés par Woolworth a disparu en même temps que lorsque les magasins qui en avaient  fermé ses portes, tout comme ses compatriotes Kresge, United, Woolco et autres. Il y a bien Wal Mart dont plusieurs succursales comportent des McDonald's mais ce n'est vraiment pas la même chose. Le comptoir à lunch d'autrefois était unique en soi et c'est bien dommage qu'il n'ait pas survécu.



Le saviez-vous? En 1960 au Woolworth de Greensboro en Caroline du Nord, quatre étudiants noirs se sont vu refuser le service parce qu'ils se trouvaient dans la section réservée au blancs. L'affaire a fait tout un tabac médiatique et est aujourd'hui connue comme le «Greensboro Sit-In».