mercredi 30 avril 2014

Le centre d'achats Van Horne en 1960


Intéressante image d’époque que celle-là. Nous voilà pif-poil dans le stationnement du centre d’achats Van Horne, qui existe toujours, et qui est situé sur l’avenue du même nom. William Van Horne est cet énergétique américain de l’Illinois qui fut embauché en 1882 par le Canadien Pacifique à titre de directeur général et dont la tâche fut de voir à la construction du chemin de fer transcontinental. 
 
De retour à la photo. Donc, nous sommes dans le stationnement du centre d’achats Van Horne mais en quelle année? Ah, ben ça c’est une question intéressante. Y’a tout un tas de petits détails qui peuvent nous aider. Bien sûr les commerces fournissent quelques indices mais souvent ils avaient pignon sur rue pendant quelques années et c’est le cas de ceux qui sont là. Tenez, tout juste à gauche on retrouve Duskes Hardware pour tous vos besoins en ferronnerie et outils. Tout juste à côté c’est le magasin de chaussures Lewis & Sons jouxté du nettoyeur Paul Services. Ensuite c’est une succursale de la Banque Royale. C’était évidemment l’époque bien avant l’arrivée des guichets automatiques alors pour dépenser votre argent fallait penser à en retirer suffisamment au guichet, et bien sûr, posséder un compte à cette banque. Pour les p’tits n’enfants la boutique The Play Pen est là pour eux avec tout un assortiment de jeux et de jouets. Les chaussures Bata suivent ainsi que Heft’s où l’on vend des vêtements pour hommes. Pour les dames c’est le magasin suivant, Reitman’s. C’est bien beau amuser les enfants mais faut les habiller alors c’est chez Scheffer’s Kiddies Shop qu’il faut aller. Vous avez un p’tit creux? Pourquoi ne pas vous arrêter au déli Brown’s Derby pour un bon sandwich à la viande fumée? Et pour tous vos besoins en tabagie United Cigar Stores est là tout juste à côté. Et le dernier et non le moindre, complètement au fond, c’est le magasin à rayons Woolworth. 
 
D’accord, tout ça est bien beau mais nous ne savons toujours pas en quelle année nous sommes. Continuons de regarder la photo. Tout juste à l’avant on peut voir une voiture s’avancer. Il s’agit d’un Dodge Coronet 1958 quatre portes. Alors nous serions donc en 1958? 
 
Pas si vite. 
 
Il se trouve d’autres voitures. Voyons voir. À gauche ça ressemble à un Plymouth 1956 alors que la décapotable derrière fait penser à un Oldsmobile 98 de 1958 suivi d’un Chevrolet Bel Air 1960 et d’un Chevrolet 210 4 portes 1955. À droite y’a un Volkswagen Beetle mais bon, peu importe l’année les Beetle n’ont à peu près pas changé. Alors, c’est en 1960 ou 1962? Il se trouve un autre indice pour définir l’année : la plaque d’immatriculation. À l’époque les voitures du Québec se devaient d’en avoir une à l’avant. Qui plus est, fallait changer de plaques à chaque année. Donc, si on regarde la photo, on peut voir que la plaque comporte des caractères clairs sur fond foncé. Les plaques de 1958 et 1961 avaient des caractères noirs sur fond blanc, ce qui élimine ces deux années. Pour l’année 1959 les caractères étaient noirs sur fond jaune, donc ce n’est pas celle-là non plus. 1960? Ah, voilà une possibilité puisque les plaques de 1960 avaient des caractères jaunes sur fond bleu. Mais un instant; celle de 1962 était similaire mais avec des caractères blancs sur fond foncé. La réponse se trouve peut-être dans la luminosité de la plaque. Le soleil, à l’ouest, éclaire bien le Dodge incluant la plaque d’immatriculation. Voyons de quoi ont l’air les plaques de 1960 et 1962 en noir et blanc comparées à la plaque du Dodge :


La plaque de 1960, comme on peut le voir, est beaucoup plus similaire à celle du Dodge. De plus, comme on ne voit sur la photo aucune voiture 1961 ou 1962, l’échantillonnage n’est pas élevé mais tout de même, je serais néanmoins porté à dire que nous sommes en 1960, durant l’été (les gens portent des chemises à manches courtes à l’arrière) vers l’heure du souper, comme en témoigne l’ombrage de la voiture. 
 
Alors si nous sommes durant l’été de 1960 que se passe-t-il? Au printemps on espérait que Montréal puisse être choisie comme ville-hôte pour l’Exposition Internationale et Universelle de 1967 mais c’est Moscou qui est sélectionnée, ce qui coïncide incidemment avec le 50è anniversaire de la Révolution bolchévique de 1917. Les amateurs de hockey peuvent au moins se réjouir puisque cette année encore les Canadiens de Montréal ont gagné le fameuse coupe Stanley, la 12è de leur histoire. On se prépare toutefois à la retraite du grand Maurice Richard. 
 
Depuis le 22 juillet les Québécois ont un nouveau gouvernement, Libéral celui-là, et dirigé par Jean Lesage. L’ancien journaliste René Lévesque se voit offrir le portfolio du ministère des Travaux publics et Ressources hydrauliques. Pendant ce temps, Jean-Paul Desbiens met la dernière touche à son manuscrit intitulé Insolences d’un frère Untel. De certains disent que le livre en devenir risque de créer pas mal de remous, surtout en ce qui concerne l’éducation.

 
Le saviez-vous? À Moscou on était bien content d’avoir pu obtenir l’Exposition Internationale et Universelle de 1967 mais le plaisir fut de courte durée puisque la ville se désista au printemps de 1962. Montréal présenta de nouveau sa candidature et cette fois la ville fut choisie le 13 novembre 1962. Pas le temps de chômer puisqu’il ne restait à ce moment-là qu’à peine cinq ans pour choisir une équipe de direction, tout concevoir, publiciser et construire. Et en passant, cet article est mon 700è. 

dimanche 27 avril 2014

La Banque de Montréal en 1887


Nous voici à la Place d’Armes en 1887. C’est l’été, comme en témoigne l’arbre bien feuillu à droite. À en juger par les ombres nous sommes dans la matinée. Le long de la rue St-Jacques, qui s’appelait alors St-James, des passants s’activent alors que quelques curieux observent avec attention le photographe avec tout son attirail. À gauche, une dame avec sa belle robe blanche à crinoline gagne le trottoir après avoir traversé la rue Place d’Armes. Pas besoin de se presser, il n'y a pas d'automobiles encore qui passent dans la rue. Et si cette rue est asphaltée, ce n’est pas le cas de la rue Notre-Dame, tout juste au sud. À cet effet les marchands qui ont pignon le long de cette rue ont remis une pétition à la ville afin de faire asphalter la section allant de la rue McGill jusqu’à la gare du Canadien Pacifique. Parlant de la ville il y a là un comité affairé aux inondations car, faut pas l’oublier, celle du printemps de 1886 a été particulièrement dévastatrice. À cet effet, sous la présidence de l’échevin Donovan il y a dépôt des soumissions pour les trois bouilloires devant faire fonctionner les pompes Worthington devant être installées dans les deux bâtiment qui achèvent d’être construits.

Mais revenons à la Place d’Armes. Devant nous se dresse l’imposant immeuble de la Banque de Montréal. Bien que l’institution financière remonte à 1817 le bâtiment que l’on voit a été construit en 1847 par l’architecte John Wells qui a conféré au bâtiment un style Néo-classique. On s’étonnera de ne pas voir le dôme mais c’est bien parce que celui-ci a été enlevé en 1859 en raison de son état qui s’était dégradé (il reviendra au début du 20è siècle cependant). 

Depuis le 22 janvier le parti Conservateur de John A. Macdonald a repris le pouvoir pour un troisième mandat consécutif et ce malgré toute l'acrimonie que le financement du Canadien Pacifique avait causé. Mais la ligne transcontinentale, terminée en 1885 et inaugurée en 1886, a permis de remplir une vieille promesse électorale faite par Macdonald lui-même peu après la Confédération, soit celle de ceinturer le pays avec une voie ferrée. Mais bon, faut dire aussi que les Libéraux d'Edward Blake n'avaient mené une campagne très énergétique. Peut-être que les choses iront mieux avec un type comme Wilfrid Laurier à la tête du parti. 1887 est une année de transition à la Banque de Montréal en ce qui concerne la présidence de la banque. Depuis 1881 c’est Charles Francis Smithers qui occupait la présidence et il avait alors succédé à George Stephen, lequel était devenu le président du Canadien Pacifique la même année. Mais à la mort de Smithers en 1887 la banque a dû lui trouver un successeur. C’est ce qu’elle a fait en nommant nul autre que Donald Alexander Smith, celui qui allait plus tard devenir Lord Strathcona, celui-là même qui avait principalement causé la chute des Conservateurs de Macdonald en 1873. Smith n’est pas un timoré, et derrière son aspect de grand-père bienveillant se cache un financier redoutable. Il est un actionnaire important de la Banque de Montréal mais aussi du Canadien Pacifique (dont il va enfoncer le dernier crampon de la ligne transcontinentale en 1885), du Manitoba Road ainsi que de la Compagnie de la Baie d’Hudson, dont il deviendra gouverneur en 1889, lui qui avait commencé là en 1838 comme simple commis. Pas si mal pour un Écossais arrivé au pays avec seulement un peu d’argent dans les poches, non?

 
Le saviez-vous? Donald Alexander Smith fut un philanthrope important. Il a donné avec son cousin George Stephen, l’argent nécessaire à la construction de l’hôpital Royal Victoria à Montréal et a fait d’importants dons à l’université McGill (dont il fut chancelier) afin d’y établir une école pour femmes. Sa magnifique maison, tout juste à l’ouest de l’actuel Centre Canadien d’Architecture fut démolie il y a de cela plusieurs années.

lundi 21 avril 2014

Toujours sur le pont du Belem


Toujours sur le pont du voilier Belem avec, cette fois, un gros plan sur un foc, c'est-à-dire la voile d'avant du bateau. C’est le long du quai Cassard face à l’Étier du Moulin à Noirmoutier-en-l’Île dans le Pays de la Loire, que l’on retrouve la voilerie Burgaud. C’est là qu’ont été fabriquées les voiles qui équipent le Belem qui lui, a son port d’attache un peu plus à l’est, à Nantes. Avec un accès facile à l’Atlantique, Noirmoutier-sur l’Île est le second port de pêche en importance dans la Vendée.

La présence du Belem par chez-nous n’était pas le fruit du hasard mais bien pour commémorer le 400è anniversaire de la fondation de Québec en 1608 par Samuel de Champlain qui lui était originaire de Brouage. Après une escale dans la Vieille Capitale, le voilier s’est dirigé vers le Vieux-Port de Montréal où il est demeuré accosté pendant quelques jours. Affable, l’équipage fort sympathique en a profité pour expliquer aux visiteurs qui montaient à bord les tenants et aboutissants des voyages en mer tout en répondant aux nombreuses questions qui leur étaient posées. 



Le saviez-vous? C’est sur la côte nord de l’île qu’un inventeur de Nantes, Brutus Villeroi, effectua les premiers essais de sous-marin français en août 1832.

vendredi 18 avril 2014

Sur le pont du Belem


C’était le début juillet 2008 et je battais la semelle dans l’vieux, comme on dit. La saison touristique battait son plein et partout y’avait ces gens venus d’un peu partout qui pointaient, qui photographient et qui scrutaient des cartes. Mais moi je n'étais que de passage car je me dirigeais plutôt vers Griffintown.

J’aurais pu clopiner sur de la Commune mais j'ai préféré longer les quais. C’est plus amusant et puis ça me permet de prendre un peu contact avec le fleuve. Tout de même ironique qu’en tant qu’insulaires les gens de Montréal n’ont que si peu d’accès aux rives. Alors je suis arrivé comme ça sur la promenade lorsque j’ai aperçu un grand voilier accosté au quai Jacques-Cartier. Tiens, que je me dis, c’est pas courant un trois-mâts barque accosté comme ça par ici!

Alors je me suis approché pour finalement apprendre qu’il s’agissait du Belem, un navire qui bat pavillon Français et qui est de passage. Qui plus est, on pouvait le visiter tout à fait gratuitement alors en parfait sosie du capitaine Haddock que je suis j’ai embarqué. On notera ici que j'utilise à son sens le plus juste : je suis embarqué dans une barque. Pas besoin de vous dire que je me suis fait aller l’obturateur. Un de ces clics, justement, c’est la photo du jour où l’on voit les ridoirs, ces tiges aux filetages inverses qui sont reliés d’un part au hauban et de l’autre à la cadène. On peut visser le tout et ce faisant on tend le hauban. C'est du moins l'une des nombreuses choses que j'ai appris ce jour-là.



Le saviez-vous? Le Belem fut construit à Nantes en 1886, ce qui en fait le plus ancien trois-mâts en état de naviguer. Il fut trouvé dans un état lamentable à Venise, racheté et restauré. Il sert aujourd’hui de bateau-école pour l’entraînement des mousses.

dimanche 13 avril 2014

Poulin Hardware en 1949


Amusant spectacle que cette vitrine de la quincaillerie Poulin qui attire, d’un côté comme de l’autre, autant l’attention d’un monsieur que d’une petite fille. Monsieur semble regarder des articles ménagers. Peut-être songe-t-il à offrir un cadeau à son épouse? L’attention de la petite fille semble se porter sur de jolis ensembles de vaisselle et divers contenants décoratifs. Un set de vaisselle à $6.95, tel qu’annoncé au haut de la vitrine ne semble pas cher mais ajusté en dollars d’aujourd’hui c’est plus de $70. Par contre, 1949 est une période où l’économie reprend du poil de la bête, la guerre étant finie depuis quatre ans. Aussi, les gens ne payaient pas encore d’impôt provincial, chose qui n’allait arriver qu’en 1954 sous le gouvernement Duplessis.

Quant au commerce il se situe au 5468 Sherbrooke ouest, soit tout juste à l’ouest de Décarie et monsieur Poulin l’a ouvert en 1934. Ce dernier, très modeste, habitait un logement situé au 4139 du boulevard Décarie. L’autoroute Décarie quant à elle était encore loin d’exister et à sa place il se trouvait une rue du nom de Girouard. Monsieur Poulin devait alors sans doute utiliser le tramway 41 Park-Ave-Snowdon pour se rendre à son commerce. C’était évidemment l’époque où la vie montréalaise se passait encore majoritairement en anglais, d’où l’appellation anglophone du magasin et ce, même si le nom de son propriétaire est bel et bien français. Depuis août 1944, la quincaillerie a pour voisin, à quelques portes seulement à l’est, la fameuse rôtisserie Chalet, laquelle existe encore de nos jours et dont le décor intérieur a bien peu changé.

De par la robe de la petite fille on peut assumer que c’est quelque part durant l’été. Il y a bien les élections fédérales qui font jaser mais la grève de l’amiante à Asbestos est de toutes les discussions, surtout ouvrières. En mai l’archevêque de Montréal Joseph Charbonneau s’est ouvertement prononcé en faveur des grévistes ce qui lui vaut les foudres de l’Église. Considéré trop à gauche pour le pouvoir public comme pour le Vatican, Charbonneau sera forcé de démissionner en 1950. Ce conflit va plus tard inspirer John Thomas McDonough à écrire en 1965 la pièce de théâtre Charbonneau and «le chef», une pièce qui sera adaptée en 1971 par Paul Hébert et Pierre Morency; Charbonneau et le chef. La grève de l’amiante, malgré de vives tensions, connaîtra son dénouement le 1er juillet. 10 sous d’augmentation et l’assurance qu’il n’y aura pas de représailles de la part des patrons. Toutefois la quincaillerie Poulin est en train de vivre ses dernières années puisqu’en 1951 elle deviendra la quincaillerie Martin. Cette dernière n’aura pignon sur rue que pendant cinq ans après quoi c’est Red Steer Steak House qui s’y installera.


 
Le saviez-vous? Bien avant l’urbanisation du secteur, il se trouvait la ferme Décarie qui produisait des melons dont la réputation s’étendait jusqu’aux États-Unis. Une partie de la terre sera plus tard aménagée en hippodrome que l’on connaîtra sous le nom de Blue Bonnets Race Course, nommé ainsi en l’honneur des soldats écossais qui défendaient la fortification de l’Upper Lachine Road durant la guerre de 1812. Leur nom? Les Blue Bonnets.

mardi 8 avril 2014

La rue Frontenac en 1970


Dans un article précédent il était question de la rue Frontenac en 1952. Aujourd’hui je vous propose de nouveau la rue Frontenac mais cette fois en 1970. Allons-y donc, si vous le voulez bien.

Depuis le printemps les Québécois sont gouvernés par le parti Libéral de Robert Bourassa qui a remporté 45% des votes. Le reste ayant été partagé entre le parti Québécois, l’Union Nationale et le Ralliement Créditiste. Dans la même foulée les gens entendent parler pour la première fois de l’Assurance Maladie dont le projet de loi est déposé à la fin juin par le ministre Claude Castonguay. Les médecins spécialistes quant à eux sont vivement opposés à ce projet de loi. Autre nouveauté dans le paysage, une loi visant à protéger les consommateurs. Depuis le début mai Terre des Hommes, qui occupe le site d’Expo 67, a ouvert ses portes pour la troisième année consécutive. Le visa de saison pour adulte est à $12 alors que celui Jeunesse est à $7.50 ($73 et $46 respectivement en dollars ajustés de 2014). L'été de '70 nous place aussi malheureusement aux portes de la fameuse crise d’octobre qui va secouer bientôt le Québec. À partir de ce moment-là les citoyens devront s’habituer à voir l’armée patrouiller les rues de la ville.

Quant à la photo elle nous place sur Frontenac quelque peu au sud de la rue Hochelaga. La position du soleil et des ombres nous laisse deviner que nous sommes sur l’heure du dîner. À l’avant-plan, à droite, un Plymouth Fury 1969, complètement redessiné par rapport à ’68, de la compagnie de taxi Lasalle ainsi qu'un autre taxi, Diamond celui-là juste derrière. À la gauche y'a un Oldsmobile Ninety-Eight, 1969 lui itou. Très visible aussi un autobus Canadian Car du circuit 94 Iberville de la Commission de Transport de Montréal (CTM) qui justement devient en 1970 la Commission de Transport de la Communauté Urbaine de Montréal (CTCUM), nom qu’elle va garder jusqu’en 1985. Les vieux Canadian Car ont encore quelques années devant eux mais leur nombre va se réduire durant les années 70 jusqu’à disparaître complètement. Les plus vieux vont se rappeler comment il était agréable de voyager dans ces vieux bus d’une autre époque. Derrière l’autobus se trouve un camion des supermarchés Steinberg, lesquels sont à ce moment-là dominants à Montréal. Dominion les talonne sérieusement par contre. Et stationné complètement à droite ça ressemble sérieusement à un Ford Galaxy 1970.

Architecturalement parlant la rue Frontenac possède encore en 1970, à peu de chose de près, l’allure qu’elle avait auparavant. On peut s’amuser, ou pas, de l’absence complète de végétation le long de la rue, quelque chose que l’on a sensiblement amélioré depuis. De part et d’autres on retrouve encore toutes ces maisons ouvrières avec toutes ces particularités qui font leur charme; corniches de bois ou tôle ouvré, appareillages de brique et aussi ces balcons, lesquels donnent directement au-dessus des trottoirs. Les commerces sont un petit peu moins nombreux que vers la rue Ontario. On retrouve néanmoins à gauche le restaurant Chez Thérèse alors qu’en face, à droite, le commerce d’articles de sports d’Yvon Roy a pignon sur rue. La Révolution Tranquille, couplée à un sentiment de nationalisme, amène des changements, particulièrement quant aux noms des boutiques et magasins qui délaissent l’anglais pour le français.

Sur les toits, de çà et là on note la présence de nombreuses antennes. Il faut dire qu’en 1970, et ce même si le câble existe depuis 1966, beaucoup de gens captent les signaux de télévision avec des antennes ou encore de bonnes vieilles oreilles de lapin sur lesquelles on place de la laine d’acier afin «d’améliorer» la réception. Et que regarde-t-on en 1970? Il y a certainement le nouveau téléroman Les Berger de l’auteur Marcel Marin et qui deviendra une des émissions les plus populaires des années 70. À l’automne, toujours à Télé-Métropole, c’est au tour de Marcel Gamache d’y aller avec une émission qui va s’avérer très populaire : Symphorien. Quant à moi, du haut de mes quatre ans, je fais des culbutes pour Bobino, Sol et Gobelet, la Souris Verte, Spider-Man, Robin Fusée, l’Escadrille sous-marine, Fusée XL-5, Supercar et les Sentinelles de l’Air.

De retour à notre rue Frontenac.

Loin derrière on peut apercevoir le Gyrotron à la Ronde, manège parfaitement décevant voire même ennuyeux qui va incessamment disparaître vers 1980. À ses côtés se dresse la Spirale qui est toujours sur le site du parc d’amusement, aujourd’hui propriété de la compagnie américaine Six Flags.

1970 marque aussi l’année où l’on démolit finalement l’immense réservoir de gaz, celui que l’on voit au fond à gauche. Construit en 1931 par la Montreal Light, Heat & Power, la compagnie est celle que le gouvernement Godbout a nationalisée en 1944 afin de créer Hydro-Québec et qui, se faisant, récupère les actifs électriques mais également le réseau de distribution de gaz. Ce réseau sera vendu en 1957 à la Corporation de gaz naturel du Québec. Celle-ci, on s’en souviendra, a fait une large promotion pour l’utilisation du gaz naturel dans les années 60. En 1969, soit un an avant la prise de la photo d’aujourd’hui, la compagnie devient Gaz Métropolitain. Quant au réservoir, parfaitement immense, il fait 364 pieds de hauteur et peut contenir 10 millions de pieds cubes. Peut-être parce que quelque part, quelqu’un s’est dit qu’avoir une telle quantité de gaz inflammable au milieu d’une zone urbaine densément peuplée n’était peut-être pas une si bonne idée.

Le sort de la rue Frontenac a cependant été quelque peu inégal au niveau de l’architecture et de l’urbanisme. Les années 70 et 80, faut-il s’en étonner, ont été particulièrement cruelles pour quantité de bâtiments à Montréal et le secteur de la rue Frontenac n’y a pas échappé. Certaines maisons sont passées sous le pic des démolisseurs pour voir s’ériger à leur place des bâtisses ternes de facture moderne n’ayant que peu ou pas d’harmonie de style avec le reste. Dans un même ordre d’idée d’autres ont été largement rénovées, surtout en façade, faisant disparaître soit avec de la nouvelle brique ou encore des panneaux d’aluminium tous ces éléments architecturaux qui faisaient tout leur charme. Il s’en trouve, heureusement, qui ont tout conservé; balcons, brique d’origine, vitraux, corniches, parapets, appareillages, carreaux ornementaux et autres. 
 

Saviez-vous ça vous autres? L’gros réservoir de gaz là, ben y’avait un camping juste à côté. Non mais ça devait tu être pittoresque rien qu’un peu? Sérieux là.Vous nous croyez pas? Ben regardez donc ça juste pour voir:





 

dimanche 6 avril 2014

nubes quae praetervolant


Il est venu du coup une sorte d’odeur rappelant celle de l’humus. Puis il y a eu cette humidité qui s’est installé soudainement. Plus loin, une marmotte détalait pour regagner son trou. En levant les yeux vers le ciel j’ai tout de suite compris.  Il y avait à l’ouest une accumulation de cumulo-nimbus qui approchait. Ça va se gâter, me suis-je dit. Dans pas long, il y aura un orage. Et que disais la météo? Conditions variable. Ben tiens!

 
HA! Conditions variables. Ça dans l’jargon ça veut dire qu’y ont aucune idée de c’qui va faire. Faque quand vous entendez ça emportez une tuque, un parapluie pis d’la crème solaire.

 

Mais je ne suis pas dupe. Je sais très bien que même si cet orage en devenir semble encore un peu loin l’éclair peut frapper près de moi à tout moment. On sait tous qu’il faut éviter à tout prix de se réfugier sous un arbre, ce qui est probablement la pire place. L’ennui? Je me trouve sur le mont Royal, pif poil au milieu du cimetière Notre-Dame-des-Neiges à patauger, appareil photo à la main, entre des pierres tombales noyées dans les hautes herbes. Fidèle à mon habitude je m’étais parfaitement égaré dans les dédales de la cité des morts et je risquais bien de les rejoindre si je ne parvenais pas à trouver un endroit pour me réfugier avant que la pétarade ne commence. Alors je me suis mis à marcher, tournant à gauche ici et à droite par là. Par ce chemin-ci? Non, ça monte. Ah, par-là donc! On oublie ça, c’est un cul-de-sac. Par ce sentier d’abord, il descend. Tout ça évidemment en regardant vers le ciel, ce ciel qui s’assombrissait de plus en plus. Eh misère!! Au pire, que je me disais, je m’adosserai à un mausolée… Mais voilà l’amusant de la chose; de pétarade il n’y a pas eu. Même pas de grondement lointain. Pas même une seule goutte de pluie. Les gros nuages, tels des molosses inoffensifs, ont tout simplement passé leur chemin et moi j'ai repris le mien, un peu plus tard. Spectacle intéressant, à tout le moins.



Le saviez-vous? Une chauve-souris du Venezuela peut détecter et éviter les gouttes de pluie durant son vol et parvient ainsi à arriver à son abri complètement sèche.