Le 18 février prochain va marquer un
certain 130è anniversaire. De quoi? Ah, mais je vous réserve la
surprise en vous racontant une histoire en trois partie avec la
première aujourd'hui même. La réponse de l'énigme sera dévoilée
à la fin de la dernière partie.
Notre histoire commence avec un
événement qui a eu lieu il y a de cela bien longtemps, en 1867,
plus précisément, lorsque fut signée la Confédération
Canadienne.
Le Manitoba, quoique beaucoup plus
petit que la province actuelle, se joint au Canada le 15 juin 1870 et
la Colombie-Britannique le 20 juillet 1871 mais cette dernière
n'accepte que sous la condition qu'elle soit reliée au reste du
pays par un chemin de fer que Macdonald leur promet en-dedans de
dix ans. Durant cette période où le pays est naissant, la voie
ferrée transcontinentale se veut plus qu'une simple paire de
rails de métal mais bien un lien permettant d'unir les territoires
du Canada et d'affermir les frontières surtout face aux visées
expansionnistes des États-Unis.
Trois groupes se proposent pour
construire ce chemin de fer. Le premier est mené par David L.
Macpherson, partenaire dans une compagnie construisant des chemins de
fer (Macpherson, Gzowski and Co.). Macpherson est non seulement
un bon ami de Macdonald mais aussi un important bailleur de fond
pour le parti Conservateur. Ho ho ha! Le deuxième groupe est celui
de C.J. Brydges du Grand Trunk et le troisième (et non le
moindre) est dirigé par Hugh Allan, armateur de Montréal qui
gère la Montreal Ocean Steamship Company et certainement l'un des
hommes les plus riches au pays.
Non visible sur la photo: le verre de brandy.
Assis à son bureau avec (fort
probablement) un verre de brandy à portée de la main,
Macdonald observe les dossiers des trois groupes candidats. Bien
qu'ils soient tous capables d'entreprendre la construction de ce
chemin de fer que Macdonald a promis à la Colombie-Britannique pour
1881, au plus tard (une promesse impossible selon plusieurs),
chacun des trois groupe possède des faiblesses en autant que
Macdonald est concerné. Il lui faudra pourtant faire un choix.
Gorgée de brandy.
Macdonald regarde le dossier de
Macpherson mais décide de l'écarter tout simplement parce qu'il ne
considère pas que son ami, aussi ami soit-il, ait ce qu'il faut pour
mener à bien le projet.
Gorgée de brandy.
Que faire de la proposition du Grand
Trunk? Ici, c'est facile. Le Grand Trunk, dont le siège social est à
Londres, n'est pas exactement la compagnie la plus populaire au
Canada. Macdonald écarte donc le dossier du Grand Trunk.
Gorgée de brandy. Puis pourquoi pas
une autre.
Il reste alors le groupe de Hugh
Allan. Ouais. S’il s’agit en fait le choix le plus logique cela
n'en fait pas pour autant le meilleur. Si, Allen est un homme
puissant qui jouit d'une très bonne réputation, surtout en
Angleterre et sa magnifique demeure montréalaise, le Ravenscrag
situé, sur le flanc du Mont-Royal est certainement témoin de
sa réussite financière. Le problème avec Allan est la
présence dans son groupe du financier américain Jay Cooke. Cooke
est un homme relativement riche et l'un des propriétaires du
Northern Pacific.
C'est que Cooke a malheureusement fait
part publiquement de ses intentions de faire profiter à sa compagnie
le chemin de fer transcontinental canadien, surtout en raison de ses
terres à l'ouest réputées pour être très fertiles.
Mais pas si vite.
Macdonald veut bien que ce foutu
chemin de fer soit réalisé mais il n'est certainement pas
désespéré au point d'en laisser la construction, l'entretien
et les opérations à des américains. Que non! Aucune décision
n'est prise et les trois groupes sont plus ou moins laissés dans la
brume. Peut-être, se dit Macdonald, qu'un autre groupe se
présentera...
Un snoro.
Mais Hugh Allan ne lâche pas le
morceau et pas pantoute à part ça! En fait, le
corpulent personnage, dont la patience n'est pas une de ses plus
grandes qualités, décide tout bonnement en 1872 d'acheter ses
adversaires parce que bon, il commence à être pas mal tanné de
Macdonald qui tergiverse sans jamais ne prendre aucune décision,
pour les raisons que l'on sait. Il a beau offrir des actions
gratuites (on parle ici de montants assez substantiels) mais son plan
ne marche tout simplement pas. Allan se retrousse les manches et
s'attaque à ce qu'il considère le cœur du problème: les
politiciens et là, rien n'est épargné; du chantage et des
pots-de-vin en voulez-vous en v'là, comme on dit. Allan va même
jusqu'à impliquer George-Étienne cartier et les 45 membres du
caucus québécois dans ses plans. Même les prêtres des villes et
villages ainsi sont mis à "contribution" afin de
faire tourner l'opinion en sa faveur. Qui plus est, il
avertit formellement Cartier que si le contrat du chemin de fer
ne lui était pas attribué il pouvait oublier l'idée de se
représenter aux élections. De tels coups de pied dans les parties
sont un exemple assez représentatif de ce qu'était la
fricassée politique du temps. Et crac!
Nous sommes toujours en septembre 1872
et voilà qu'arrivent les élections fédérales. Oh, les
Conservateurs se font bel et bien reporter au pouvoir quelques jours
plus tard mais ils forment alors un gouvernement minoritaire.
Avec cette réélection Allan est alors persuadé d'obtenir le
contrat du chemin de fer transcontinental. Il glousse tellement
qu'il décide de larguer cavalièrement ses amis américains
dont il considère ne plus avoir besoin. Ceux-ci n'en font pas
tellement de cas et retournent vaguer à leurs occupations
américaines et toute l'affaire aurait pu se terminer là.
C'était sans compter un de ces américains, un certain George
McMulen qui n'est rien de moins que cent pour cent furax face à la
trahison d'Allen et rien ne lui ferait plus plaisir que de
saisir Allen par le cou et de le secouer jusqu'à ce que les
dents lui claquent dans la bouche.
C'est un McMullen
vindicatif qui retontit chez les Libéraux avec toute la
documentation mettant à jour tous les cent tours de Centour
d'Allen et de Macdonald. On apprend ainsi qu’Allan allait obtenir
le fameux contrat du chemin de fer en retour de donations
politiques d'environ $360,000. La cerise sur le sundae étant
bien entendu ce fameux télégramme confidentiel dérobé dans
le coffre-fort d'Allen où Macdonald, quelques jours avant les
élections, demande à Allen une somme supplémentaire de
$10,000. Sur ce télégramme relativement court on peut y lire: "Je
dois avoir un autre $10,000. C'est mon dernier appel. Ne me laissez
pas tomber. Répondez aujourd'hui.".
Pas besoin de dire que les caricaturistes de l'époque se délectèrent
de cette histoire!
Dans la paume gauche de Macdonald on voit le fameux message du télégramme demandant $10,000 à Allan, dans la main droite la prorogation et la suppression de l'investigation. La bouteille d'alcool n'est pas là par hasard.
Le personnage à gauche est Alexander Mackenzie du parti Libéral et adversaire politique de Macdonald.
Dans
le prochain et deuxième article de cette série de trois qui sera
publié mercredi le 16, je vous raconterai comment un officier de la
compagnie de la Baie d'Hudson est parvenu à faire dérailler
les Conservateurs de Macdonald.
Le saviez-vous? Un homme politique qui n'avait jamais vu Macdonald a été tellement étonné de son apparence qu'il l'a décrit comme un «vieux mendiant miteux» (seedy old beggar).
Le saviez-vous? Un homme politique qui n'avait jamais vu Macdonald a été tellement étonné de son apparence qu'il l'a décrit comme un «vieux mendiant miteux» (seedy old beggar).
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