Le mont Royal,
bien qu’il s’agisse en réalité d’une colline, est un relief
géographique qui fait partie intégrante de l’image et l’identité
de Montréal. Mais au 19è siècle une bonne partie des terres qui
s’y trouvent sont privées et appartiennent à de riches
propriétaires. Ceux-ci en font bien ce qui leur plait. Il y a eu quelques bonnes décisions comme la famille Beaubien qui a fait don des
terres qu’elle possédait pour l’aménagement du cimetière Notre-Dame-des-Neiges mais à d’autres occasions ce n’était pas aussi reluisant. C’a été le
cas d’un certain Lamothe, propriétaire d’une terre sur le
versant sud, et qui a procédé, vers la fin des années 1860, à une
coupe à blanc en bonne et due forme.
Vers 1872 la ville de Montréal semble se doter d'un brin de conscience quant au mont Royal et on entreprend d'acquérir les terres de onze propriétaires dans
le but de transformer le tout en un magnifique parc urbain. Les élus
de l’époque, comme on peut le voir, étaient issus d’un moule
bien différent de ceux d’aujourd’hui et leur définition de
parc est toute aussi différente. On ne parle pas ici d’un large
rectangle de gazon tondu à ras avec trois arbres et deux poubelles
mal fichues. Non, on parle ici d’un parc dans la même veine que
Central Park à New York. Et si on veut un parc semblable la solution
est claire comme de l’eau de roche : il ne suffit que de faire
appel au même architecte, en occurrence Frederick Law Olmstead et les plans de ce
parc en devenir lui sont donc confiés. Ce
dernier n’est pas un timoré et dote le parc de sentier sinueux qui
tire profit de la topographie et de la nature environnante. Les
travaux débutent en 1874 et deux ans plus tard on inaugure le tout
mais certains aménagements s’étirent toutefois jusqu’en 1877.
Quoiqu’il en soit le parc du mont Royal permet alors aux gens de
fuir le tumulte de la ville et de faire le plein d’air pur et de
verdure.
Le funiculaire, tel qu'il apparaissait au début du 20è siècle.
(Photo: Archives de la Ville de Montréal)
(Photo: Archives de la Ville de Montréal)
En 1884, face à
l’actuelle rue Duluth, on ajoute une particularité intéressante
soit un funiculaire permettant de se rendre au sommet. Pour
l’emprunter les adultes doivent débourser environ 5 sous et les
enfants 3 sous. C’est un funiculaire toutefois un peu poussif et
doit faire deux arrêts avant d’arriver en haut complètement. Les
choses vont bien jusqu’en 1918 parce que cette année-là on
s’inquiète un peu de toute la structure et après un examen
approfondi on décide de le fermer. Ce n’est pas sécuritaire,
affirme-t-on. Deux ans plus tard on le démonte complètement. Mais
y’a pas seulement le funiculaire qui démonté, les gens du
Mile-end aussi parce qu’ils viennent alors de perdre leur seul et
unique accès à la montagne.
La
Montreal
Tramways Company,
ancêtre de l’actuelle STM, propose un service de navette
relativement long via le chemin de la Côte-des-Neiges mais pour les
gens du Mile-End il n’était pas question de faire un aussi grand
détour. La Montreal Tramways a donc retroussé ses manches et refait
ses devoirs. C’est à ce moment-là que les ingénieurs ont tracé
un chemin qui joignait l’extrémité ouest de l’avenue du
Mont-Royal au chemin Remembrance, de l'autre côté du mont. Il s’agissait d’un parcours sinueux à souhait et
pour lequel il a fallu percer dans le roc un tunnel de plus de 300
pieds de long afin de joindre le chemin Remembrance. À cette époque on préférait le pic et la pelle et mon arrière-grand-père y a oeuvré à ce tunnel. Il en a pioché tout un coup et, une fois la journée terminée il devait retourner chez-lui à pied car il n'avait pas assez de sous pour prendre le tramway. Ces travaux,
amorcés alors que commençait à sévir la crise économique,
s’inscrivent dans une série d’autres projets pour le mont qui incluent le chalet de la montagne, le central d’alarme du
Service des incendies ainsi que le lac aux castors. Lorsque le tunnel
est terminé la Montreal
tramways Company
y installe des voies de tramway et c’est le circuit 11
Mountain-Montagne
qui va passer là.
Ici, on voit le tramway sortir du tunnel pour amorcer sa descente vers Mont-Royal.
(Photo: Archives de la STM)
Sur cette autre photo, on peut voir que l'opérateur a inversé le numéro du tramway, lequel affiche le 22 plutôt que le 11. (Photo: Archives STM)
La
fin des années 50 ne sonne pas seulement le glas pour les tramways,
on y couronne aussi la nouvelle reine de Montréal :
l’automobile. Le vieux tunnel quant à lui n’avait plus sa raison
d’être alors on l’a joyeusement fait sauter à la dynamite. Ce
n’est qu’en 1960 que l’ancien circuit de tramway reprendra du
service, cette fois avec une ligne d’autobus qui va conserver le
même numéro. Aujourd’hui, la voie Camillien-Houde suit assez
rigoureusement le même chemin que les tramways de l’époque. Quant
au funiculaire il n’en reste que quelques morceaux épars que l'on peut observer en se promenant au bon endroit, soit un peu au sud du monument de Georges-Étienne Cartier.
Voici de quoi a l'air l'ancien emplacement du tunnel. De part et d'autre la nature a repris ses droits. On remarquera aussi la paroi rocheuse à droite ainsi que la panneau qui indique le risque d'éboulis.
Le
saviez-vous? Malgré
une pente de 8% et deux virages serrés en épingle il n’y a eu
aucun déraillement de tramway sur cette ligne.
Cet explorateur urbain croit avoir trouvé les derniers vestiges du quai d'arrivée du funiculaire au haut de la montagne :
RépondreEffacerhttps://www.youtube.com/watch?v=wucPm7OkCAs
Pour ma part, je me demande encore la raison première pour creuser un tunnel pour le tramway, alors qu'on s'accommode très bien d'un ciel ouvert pour les automobiles. On maîtrisait mal la dynamite lors de la construction de la ligne "11" ? Ou était-ce pour éviter qu'un éboulis fasse dérailler le tramway si on se privait du tunnel ? Sauriez-vous me répondre ? Merci §:c)
La construction du tunnel a été amorcée vers 1930 pendant les crise économique. Mon arrière-grand-père a travaillé au creusage de ce tunnel et une bonne partie des travaux se faisaient au pic et à la pelle. Un tunnel plutôt qu'une tranchée avait deux avantage; économique et plus rapide qu'une tranchée ouverte.
EffacerPluche
Avec le tunnel, on pouvait aisément circuler du parc du Mont-Royal au cimetière protestant en passant dessus le tunnel. Sur le trajet du tramway, il y avait aussi un passerelle qui permettait de traverser les voies.
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