Détail
de la partie supérieure du portique de l’église du Sacré-Cœur,
située sur la rue Ontario entre Plessis et Alexandre-de-Sève. Il
s’agit d’une certaine quantité de photos que j’ai prises de
cette église qui possède, comme bien d’autre, sa petite histoire
et que je vais partager avec vous aujourd’hui.
Cette
église-là a été construite en 1887 selon les plans de
l’architecte Joseph Venne mais le soubassement, œuvre de
l’architecte Adolphe Lévêque, existait depuis 1876. L’église
se trouvait dans le faubourg Sainte-Marie, tout juste à côté du
faubourg Saint-Jacques, lequel commençait deux rues à l’ouest.
C’était le temps où la rue Alexandre-de-Sève portait le nom de
Maisonneuve et que la rue Maisonneuve s’appelait Mignone, laquelle
s’arrêtait à Saint-Urbain. La construction a fait appel à son
lot d’artisans doués, lesquels ont certainement dû recevoir à
plus d’une reprise la visite de monseigneur Fabre.
C’est
aussi le temps où Montréal s’active, où ses industries
commencent à prendre de plus en plus de vigueur. Depuis l’année
précédente, de par la gare Dalhousie, les trains du Canadien
Pacifique joignent maintenant la lointaine ville de Vancouver dans
l’ouest canadien. La compagnie ferroviaire commence d’ailleurs
projeter, discrètement, les plans de nouvelles installations pour
des usines vastes et modernes, possiblement quelque part plus à
l’est. D’ailleurs, l’ancien village d’Hochelaga, annexé à
la Montréal depuis 1883 ne montre-t-il pas des signes d’une forte
activité industrielle?
Entretemps,
3 avril 1922, un incendie se déclare dans l’église du
Sacré-Coeur. Le sacristain, monsieur Joseph Lamarche, aperçoit les
premiers signes et sonne immédiatement l’alarme. L’abbé
Caumartin, vicaire de la paroisse est le premier à répondre et
entre dans l’église de par le sacristie pour se rendre compte avec
grand effroi que l’orgue au complet était en train de brûler, tel
une grande torche dont les flammes tourbillonnaient autour des tuyaux
pour s’élever jusqu’au plafond. Avec l’aide des abbés
Deschênes, Gagnon et Léonard il sauve les Saintes-Espèces et les
habits sacerdotaux.
En
moins de cinq minutes une petite armée de pompiers se trouve sur
place sous la direction du chef Marin et s’amorce dès lors un
combat acharné. Le feu, on le voit bien, prend de l’ampleur et un
vent violent active encore davantage l’élément destructeur. Pour
le chef Marin il ne fait pas de doute qu’il faut des renforts et il
sonne deux alarmes consécutives. Dès lors le chef Chevalier et le
sous-chef St-Pierre prennent la relève des opérations. On compte
par moins de quarante jets d’eau et il y a bon espoir de
circonscrire l’incendie. Malheureusement on aperçoit le feu
rejoindre le clocher qui se trouve près de la rue Plessis et bientôt
de l’épaisse fumée se dégage du toit du corps principal de
l’église. Puis le clocher tombe avec fracas sur le parterre qui
donne sur la rue Ontario. Les pompiers commencent à craindre pour le
presbytère et leurs efforts se concentrent sur le clocher qui se
trouve à côté. Si ce dernier ne peut être sauvé on aura au moins
réussi à faire s’épargner le presbytère. Un peu passé 18 :00
on a enfin maîtrisé le brasier mais les sapeurs restent sur place
afin de continuer à arroser pendant toute la nuit. S’il y a une
chose dont on est certain c’est que le bâtiment est une perte
totale. À l’intérieur il ne reste que des tas de cendres et amas
calcinés parmi lesquels figurent le grand orgue, les boiseries, les
vitraux et quantité d’autres choses. Il faudra tout reconstruire.
Pour
les paroissiens c’est là une catastrophe dont on se serait bien
passé. Le curé Cousineau, loin de se baisser les bras, a relevé
ses manches afin de pouvoir continuer à offrir les cérémonies et
autres rituels. On ne s’explique toutefois pas la cause mais on
soupçonne le moteur qui actionne les orgues. N’avait-il d’ailleurs
pas pris feu au mois de décembre? Heureusement que l’on en avait
eu connaissance à temps pour l’éteindre aussitôt à l’aide
d’un extincteur.
La
loi autorisant la reconstruction de l’église du Sacré-Cœur est
alors sanctionnée par la ville de Montréal, alors sous la gouverne
du maire Médéric Martin, où l’on mentionne, en préambule,
«ATTENDU
que le curé et les marguilliers de l'Œuvre et fabrique de la
paroisse du Sacré-Cœur-de-Jésus, dans la cité de Montréal, ont,
par leur pétition, représenté: Que le trois avril 1922, le feu a
détruit entièrement l'église et la sacristie de cette paroisse;
Qu'il est urgent, pour le bien de la paroisse, de reconstruire et de
meubler au plus tôt, sur le terrain de la fabrique, l'église et la
sacristie, en utilisant autant que possible les parties de murs,
épargnées par le feu, de l'ancienne église et de la sacristie.»
Cette
reconstruction délicate on la confie de nouveau à Joseph Venne,
lequel réside dans ladite paroisse, mais ce dernier doit travailler
avec certaines restrictions d’ordre monétaires. C’est que les
pertes sont estimées à quelque chose qui frôle de demi-million et
il en faudrait autant, sinon plus, pour tout refaire. L’ennui c’est
que les assurances s’élèvent à un montant qui varie entre
$175,000 et $180,000. Parmi les sacrifices architecturaux il y aura
les clochers, que l’on ne reconstruira pas. Ces derniers
demeureront plats.
Le
saviez-vous? La façade actuelle de l’église fait partie des
éléments architecturaux du bâtiment d’origine qui ont pu être
sauvés. Toutefois, durant la reconstruction, d’importants travaux
de consolidation ont été nécessaires.
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