Les
maisons hantées de carnaval ont connues leurs plus belles années
durant les années 60 et 70 alors que chaque parc d’attractions en
avait au moins une. Pour les malchanceux et malchanceuses qui n’ont
pas connu ces merveilleuses choses, et pour probablement rappeler de
bons souvenirs aux autres, je vous propose aujourd’hui un article
dans lequel j’explique l’ABC des maisons hantées de carnaval et
comment tout ça fonctionnait.
On
va commencer par le tout début et voir un peu en quoi consiste une
maison hantée. Il s’agit tout simplement d’un parcours que les
gens font au travers une maison, laquelle est truffée de squelettes,
monstres, sorcières, goblins et autres créatures qui n’ont autre
fonction que de vous faire faire dans votre froc.
Maintenant,
ces maisons hantées se divisent en deux catégories distinctes; la
première consiste en une structure dont le parcours se fait assis
dans un petit charriot sur rail et qui suit son chemin de façon
automatisée. Une fois parti ce dernier ne s’arrête que lorsqu’il
ressort à la fin. Le Moulin
de la sorcière, dont je parlais plus haut, était de ce type.
Le
parcours intérieur se déroulait évidemment dans le noir le plus
total et de changer subitement de direction, de monter ou descendre
faisait évidemment partie du programme destiné à faire peur. Comme
je le disais, le charriot ne s’arrêtait pas et comme les scènes
d’épouvante n’étaient vues que pour un très court laps de
temps nul besoin d’avoir des mises en scène élaborées.
Généralement on utilisait des catins animatroniques affublés de
masques en caoutchouc ou de vulgaires pantins de papier mâché
barbouillés de peinture fluorescente. Des pierres tombales en
styromousse, de la broche à poule et un hibou à dix dollars acheté
dans un magasin de grande surface suffisaient. Tout dépendant du budget on pouvait aussi se procurer des appareillages d'épouvante mécanisés prêts à l'emploi.
Pour
produire un effet maximum sur la «clientèle» on misait sur l’effet
de surprise créé par la bibitte en question qui surgissait
subitement avec un éclairage subtil, animée par des contacts
électriques sur les rails, et généralement accompagnée de sons
stridents. Quelques secondes plus tard, une fois le charriot passé,
elle regagnait son antre et tout redevenait noir. Le stratagème se
répétait une dizaine de pieds plus loin avec une autre mise en
scène. Pour offrir une variation sur le thème certaines maisons
hantées simulaient, par exemple, un déraillement. Les gens voyaient
l’endroit où le charriot se dirigeait et tout d’un coup il
tournait brusquement dans un fracas, parfois en descendant une petite
pente. Ça ne manquait jamais de causer quantité de cris de frayeur.
Aussi, durant le trajet, on pouvait placer des portes de métal
peinturées de noir mat, parfaitement invisibles, et conçues pour
produire un vacarme de tous les diables.
Ces
maisons hantées nécessitaient toutefois quantité de travaux
d’entretien et aussi des réparations. Par exemple, il pouvait
arriver qu’un contact électrique soit défectueux et qu’une mise
en scène ne s’anime pas. Ça pouvait aussi être un charriot qui
cahotait durant le trajet ou encore des lumières de sortie d’urgence
brûlées. Quoiqu’il en soit, une fois les lumières allumées
l’intérieur de la maison hantée ressemblait parfois à un
chantier et n’avait rien de bien effrayant. Ici et là des fils
électriques, des portes d’accès, des coffres s’outils,
extincteurs et autres se retrouvaient un peu partout. Nul besoin de
les dissimuler car les visiteurs, plongés dans le noir, ne les
voyaient pas. Certaines maisons comportaient même un atelier sur
place où l’on pouvait effectuer tous les travaux requis. Des
passages «secrets» permettaient aux employés de suivre les
charriots afin de s’assurer que des gens ne débarquent pas durant
le trajet ou de venir en aide à ceux qui restaient coincés suite à
une défectuosité.
L’extérieur
de ces maisons était dichotomique; Les côtés et l’arrière,
souvent inaccessibles au public, étaient bien ordinaires et
n’avaient rien de bien particulier. Seule la devanture avait une
apparence d’épouvante. Celles-ci étaient souvent très élaborées.
Outre des mannequins animés il se trouvait des systèmes
d’éclairages complexes, sonorisation d’usage et décoration
appropriée. Voici d’ailleurs quelques exemples types :
Plusieurs
de ces maisons hantées étaient fabriquées sur place, sur mesure
selon des spécifications précises propres aux propriétaires des
parcs. Si l’espace était restreint et aussi pour des raisons de
budget, elles pouvaient aussi être achetées toutes faites et
livrées clé-en-main. Un marché de maisons hantées usagées
permettait aussi de faire des économies substantielles puisque l’on
pouvait se les procurer pour une fraction du prix d’une neuve.
La
deuxième catégorie de maisons hantées est celle du type que l’on
visite à pied. Celle-là est foncièrement différente de la
précédente pour plusieurs raisons et les entrailles, on s’en
doute, étaient assez différentes. Dans ce modèle les gens
avancaient à leur rythme et de ce fait les mises en scènes ne
pouvaient être des agencements boboche barbouillés de peinture fluo
car les gens les voyaient plus longuement. Pour ce faire deux options
s’offraient; la première était de construire des mises en scène
élaborées utilisant des mannequins convaincants ou encore de faire
appel à des gens costumés. C’était le cas du House
of Haunts à Gannanoque en Ontario. Toutefois, les employés
étaient soumis à des codes de conduite très stricts. Un job de
rêve? Voyons plutôt si c’était bien le cas.
D’abord
les employés se voyaient confier des rôles bien définis et se
devaient «de n’opérer» que dans les secteurs qui leurs étaient
assignés. Il leur était également interdit de «sortir» du
personnage et de fraterniser avec les visiteurs même si ce n’était
pour dire qu’il faisait chaud sous le costume. Dans un même ordre
d’idée les discussions entre employés étaient aussi interdites.
Les costumes, même s’ils étaient fournis, étaient la
responsabilité des employés quant au nettoyage. La lampe de poche,
obligatoire, faisait partie intégrante de l’uniforme et ne devait
être qu’utilisé qu’en cas d’urgence. Quant aux visiteurs,
interdiction totale et formelle de leur toucher et ce, sous peine de
renvoi. Aussi, comme ces maisons hantées opéraient selon des
horaires précis les retards ne pouvaient être tolérés, pour des
raisons évidentes.
L’autre
aspect des coulisses est celui qui concerne la loi. Chaque maison
hantée, peu importe son type, doit se conformer aux règlements
municipaux en vigueur. Ça inclut les systèmes d’incendie,
détecteurs de fumée, issues de secours clairement indiquées et
avertissements clairs à la clientèle à risque; personnes avec des
conditions cardiaques, sujettes aux crises de panique, agoraphobes et
femmes enceintes.
Durant
les années 60,70 et 80 il se trouvait deux de ces manèges à
Montréal; la Maison Hantée du Parc Belmont, dont
je vous ai déjà parlé ainsi que le Moulin de la Sorcière à
La Ronde, tous deux de type à charriot. Ils ont chacun remporté un
vif succès et les enfants se pressaient toujours pour aller y faire
un tour. Ils n’existent plus ni l’un ni l’autre; le Parc
Belmont a été fermé au début des années 80 et La Ronde a retiré
le Moulin du site il y a de cela un certain temps. C’est un peu
dommage dans le fond.
Aujourd’hui,
et à moins que je ne me trompe, les maisons hantées les plus
proches de Montréal se trouvent dans le secteur de Clifton Hill à
Niagara Falls. Il se trouve là toute une petite brochette de ces
attractions qui opèrent généralement toutes avec des employés
costumés.
Le
saviez-vous? Aux États-Unis on compte pas moins de 2,000 de ces
établissements lesquels reçoivent en moyenne plus de 12 millions de
visiteurs par an. Avec les billets d’entrée, évènements et
marchandises diverses, l’industrie des attractions hantées est une
affaire de plusieurs milliards de dollars.
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