dimanche 25 janvier 2015

Une question d'échelle

L’astronomie est un truc qui m’a toujours fasciné. J’étais un p’tit proutte qui ne savait même pas lire que j’avais toujours le nez fourré dans les encyclos que mon grand-oncle me laissait «consulter». Heureusement y’avait dedans tout plein d’images fascinantes; j’y voyais des planètes lointaines aux teintes surprenantes, des lunes étranges, des nébuleuses, des constellations d’étoiles et combien d’autres choses tout aussi mystérieuses et, en tournant les pages, j’étais toujours un peu déçu de ne jamais apercevoir la fusée XL-5 quelque part.

À la télé, je voyais les reportages sur les missions Apollo, lesquelles à ce moment-là tiraient à leur fin. Et un jour, en voyant les astronautes gambader sur la Lune j’ai osé la question : ils sont où ces astronautes? Mon grand-oncle m’a alors amené sur le balcon d’en arrière et a pointé du doigt le disque blanc dans le ciel. Ils sont là-bas, m’a-t-il dit. Ils doivent porter des combinaisons parce qu’il n’y a pas d’air sur la Lune.

Et c’est loin comment la Lune? Que j’ai demandé. Très loin m’a-t-il répondu. Ah? D’accord, mais loin comment? Bien qu’il aurait voulu m’expliquer le concept de l’énorme distance qui sépare la Terre de la Lune je n’aurais absolument rien compris parce ce que lorsque l’on va à la maternelle, aller au supermarché c’est presque le bout du monde alors imaginez la Lune!

Cette Lune nous l’avons foulée depuis bien longtemps et c’est bien malheureux que nous ayons cessé. Nous avons aussi envoyés des sondes ainsi que des robots un peu partout dans notre système solaire, lesquels nous ont retransmis des images et des données extraordinairement précieuses. Je me souviens des premières images de la surface de Mars retransmises par les sondes Viking ou encore celles de Vénus par les sondes Venera. En 1977, l’année de Star Wars, on a envoyé deux sondes jumelles, Voyager 1 et 2 explorer les confins du système solaire. Encore aujourd’hui les deux vétérans poursuivent leurs chemins et, incroyablement, parviennent toujours à nous transmettre des informations. Plus près de nous la NASA a envoyé sur la surface de Mars deux véhicules; Opportunity se ballade depuis maintenant onze ans et Curiosity, lequel est beaucoup plus gros et aussi plus complexe. Les données, tant scientifiques que visuelles qu’il nous retransmet sont rien de moins que fascinantes et, avec les moyens techniques d’aujourd’hui, on peut accompagner Curiosity grâce au web. Plus récemment nous sommes parvenus à se faire se poser sur une comète une autre sonde, Rosetta. Imaginez un peu toute la science et la mathématique requise pour réaliser un tel exploit! Et bientôt ce sera au tour de la sonde New Horizons, laquelles’approche, au moment d’écrire ceci, de la mystérieuse Pluton.

Mais malgré toutes les fois où l’on entend parler de Mars, Jupiter ou Pluton, nous ne parlons toujours que de notre système solaire, cette petite arrière-cour avec laquelle nous sommes aujourd’hui plutôt familiers. Toutefois, avons-nous réellement une idée de la taille de notre système solaire et de ce qui se trouve au-delà? À cet effet je vous propose donc dans l’article d’aujourd’hui un petit exercice comparatif qui vous aidera à mieux saisir les dimensions de notre univers.

On va commencer par notre bonne vieille Terre. Celle-ci fait approximativement 40,000 kilomètres de diamètre. C’est une bonne distance. Si cela était possible, faire le tour de la Terre à son équateur en voiture à une vitesse de 130 km/h prendrait quelque chose comme douze jours et quelques heures à parcourir. Ça donne une bonne idée de la taille de la Terre. Maintenant on va s’amuser avec les proportions afin mieux définir la taille de la Terre par rapport au système solaire. Réduisons le Soleil à une taille un peu plus petite, disons un énorme ballon de plage de 26 pieds (8m) de diamètre et plaçons-le, disons, pif-poil au milieu de l’intersection des rues Sherbrooke et St-Laurent. Voilààà. Histoire de conserver les proportions on va maintenant réduire la Terre à la même échelle, soit une bonne vieille balle de baseball. Et où place-t-on cette balle de baseball? Sur la rue Sherbrooke mais à l’intersection de la rue St-Christophe dans l’est. Ce qui veut dire que son orbite l’amène aussi loin à l’ouest qu’à la rue Union, au nord à la rue Napoléon (pas loin du restaurant Chez Moishes) et au sud dans les environs de la rue de la Gauchetière. La Lune quant à elle est une balle de ping-pong qui orbite la balle de baseball à une distance d’environ 6’7 (2m). Maintenant je vais vous étourdir un peu.

L’étoile la plus proche de notre système solaire est Proxima du Centaure, une naine rouge située à quelques 4.2 années-lumière de nous. Une année-lumière étant une unité de mesure définie par la distance que parcourt la lumière en une année à la vitesse de 350,000 km/h. Ça veut donc dire que si vous partez de la Terre dans une fusée et voyagez à cette vitesse vers Proxima du Centaure il vous faudra 4.2 années avant de l’atteindre (2.1 années pour accélérer et 2.1 années pour déccélérer). Mais encore là, c’est une distance qu’il n’est pas facile à conceptualiser. Reprenons notre Soleil et cette fois ramenons-le à la taille d’une orange navel puis déposons-la, encore une fois, à l’intersection des rues Sherbrooke et St-Laurent. Maintenant, à quelle distance se trouve Proxima du Centaure? Essayez la pointe ouest de Vancouver, en Colombie-Britannique. Et ça, c’est l’étoile la plus proche. Bon, avec ça nous avons une meilleure idée des proportions mais amenons ça une coche plus haut. Notre galaxie, la Voie Lactée, compte une quantité absolument gigantesque d’étoiles de toutes sortes. Combien? On ne peut répondre précisément à cette question mais on a avancé des estimés allant jusqu’à approximativement 100 milliards. Mais voilà, notre galaxie n’est pas la seule dans l’univers, de loin s’en faut. Il y en a beaucoup d’autres mais combien? Encore ici, c’est difficile à dire avec exactitude. Toutefois nous disposons d’un outil très utile pour nous donner une idée approximative : le télescope spatial Hubble. En orbite autour de la Terre, les instruments optiques de Hubble ne sont pas gênés par la pollution lumineuse et autres distorsions atmosphériques, permettant d’avoir des images très claires et très nettes de notre univers. Un jour on a pointé un de ces instruments dans une région très précise en direction de la constellation du Fourneau. Une région pas très grande toutefois, quelque chose comme une petite fraction de la taille d'une pleine lune. C'est le Extra Deep Field, ou, si vous préférez, XDF. Regardez l'image ci-bas et notez le petit rectangle. Il s'agit de l'endroit précis que Hubble a longement observé. 


Avec un temps d’exposition très long, permettant ainsi de pouvoir capter des sources de lumière très éloignées et très faibles, on a colligés les résultats et et assemblé l'image finale. Ce qu'on y a découvert dépassait l’entendement.


Le petit rectangle? voici ce qu'il contenait. À part quelques étoiles de chez-nous, reconnaissables à leurs pointes, presque chaque point lumineux que vous voyez sur cette photo est une galaxie. À partir de cette image, qui compte des milliers de galaxies, on a estimé qu’il se trouve, dans l’univers observable, quelque chose comme 200 milliards de galaxies. Multipliez maintenant cela par le nombre d’étoiles qui se trouve dans chacune d’entre elles, soit 100 milliards. Le résultat de cette multiplication donne un 2 suivi de 24 zéros. Le regretté astronome Carl Sagan avait avancé l’idée qu’il se trouvait dans l’Espace autant d’étoiles sinon plus que tous les grains de sables de toutes les plages sur Terre. Commencez-vous à avoir le vertige?

Mais voilà qui est amusant, même lorsque l’on dit qu’une galaxie peut contenir 200 milliards d’étoiles il n’est pas facile d’avoir une conception visuelle bien précise parce que 200 milliards, c’est tout de même beaucoup. Or nous vivons à une époque où les percées technologiques nous permettent de plus en plus d’apercevoir des choses incroyables. Dernièrement la NASA a utilisé la caméra ACS (Advanced Camera for Surveys) d’Hubble pour prendre plus de 411 images de notre galaxie voisine dont j’ai parlé plus haut, Andromède et qui est estimée être assez similaire à notre bonne Voie Lactée. On a ensuite rapiécé les 411 images pour en faire une sorte de courtepointe tout à fait incroyable. On peut d’ailleurs admirer le résultat en cliquant sur ce lien. Le site propose d'explorer un coin d'Andromède un peu à la manière de Google Maps, on peut zoomer et, à chaque fois que l’on zoome, l’image se précise et ainsi de suite jusqu’à atteindre une profondeur tout à fait étonnante. Et comment Andromède est éloignée? Si la Voie Lactée et Andromède étaient des bacs de sable d’environ 20 pieds de diamètre elles seraient éloignées de 2000 pieds l’une de l’autre.

Fascinant, n’est-ce pas? Maintenant dites-vous que chacun des points lumineux dans l’image est un soleil autour desquels orbitent possiblement des planètes. Se pourrait-il que des formes de vies, potentiellement intelligentes, se soient développées? C’est sur cette question que s’est penché le professeur Frank Drake en 1961 et qui l’a amené à proposer ce qui est devenu l’équation de Drake, laquelle, avec un savant calcul, estime le nombre de civilisations intelligentes dans la galaxie et qui se lit comme suit :
  • N est le nombre de civilisations extraterrestres dans notre galaxie avec lesquelles nous pourrions entrer en contact
  • R* est le nombre d'étoiles en formation par an dans notre galaxie ;
  • fp est la fraction de ces étoiles possédant des planètes ;
  • ne est le nombre moyen de planètes potentiellement propices à la vie par étoile ;
  • fl est la fraction de ces planètes sur lesquelles la vie apparaît effectivement ;
  • fi est la fraction de ces planètes sur lesquelles apparaît une vie intelligente ;
  • fc est la fraction de ces planètes capables et désireuses de communiquer ;
  • L est la durée de vie moyenne d'une civilisation, en années.
Résultat? Dans notre galaxie seulement on estime le nombre de civilisations intelligentes entre 1,000 et 100, 000,000 et on estime qu'il se trouve possiblement 200 milliards de galaxies dans l'Univers. 





Le saviez-vous? Le nom de « Voie lactée » (Galaxías en grec) trouve son origine dans la mythologie grecque : Zeus, désirant rendre Héraclès immortel, lui fit téter le sein d’Héra alors endormie. Celle-ci essaye d'arracher Héraclès de son sein, et y parvient en laissant une giclée de lait s'épandre dans le ciel, formant ainsi la Voie lactée. 

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